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Critique de Maldoror


"Si Dieu est tout-puissant et bon, comment peut-il accepter l'existence du mal et de la souffrance ?" Cette grande, grosse question lancinante constitue depuis des millénaires, faute de véritable réponse, une terrible épine dans le pied, voire dans le coeur, des croyances. Elle est même la grande source d'incroyance.
Quand on imagine les générations de théologiens, prophètes, philosophes, mystiques qui se sont penchées sur le problème de toute la force de leurs convictions et de leurs intelligences, à la place de notre auteure, tout un chacun aurait pu être raisonnablement effrayé en s'engageant dans l'approche de cette équation diabolique.

Mais voilà pas de roulements de tambour dans le livre, pas d'arrogance, pas de prétention d'aucune sorte, pas de grande théorie et surtout aucun dogmatisme. Marion Muller-Colard arrive comme sur la pointe des pieds, en tremblant, avec la toute petite centaine de pages de son livre. Et elle nous pose son vécu, son expérience. Elle nous écrit avec une infinie délicatesse et une grande sensibilité ce que la souffrance qu'elle a elle-même endurée, ce que les détresses qu'elle a accompagnées au quotidien comme aumônier d'hôpital, ont fait résonner en elle, ont réussi à forger dans sa spiritualité et sa théologie personnelle. Et ainsi, une espèce de foi de convertie lui fait vouloir partager ses expériences et ses réflexions dans l'espoir de nous aider un tant soit peu à surmonter nos malheurs et surtout à ne pas nous tromper de combat dans nos épreuves.

En effet, la plus grande partie de l'ouvrage est consacrée à démolir nos croyances naturelles magiques, nos "enclos", qui nous fourvoient et nous abattent, parce qu'elles ne résistent pas à cette équation impossible.
Or, l'auteure semble nous dire qu'au bout du compte, cette problématique elle-même n'a probablement pas de sens parce que notre image de Dieu est fausse. Il n'est pas le grand magicien, le grand juge ou autres représentations qui nous encombrent. Elle nous dit donc de nous tourner vers "l'Autre Dieu", celui que nous ne connaissons pas, que nous n'appréhendons pas, qui est en dehors de la plupart de nos fois. Évidemment, elle ose à peine nous dire où regarder, qui est ce Tout-Autre que presqu'ontologiquement on ne peut concevoir par nous-mêmes. Et elle nous rappelle que nous sommes pollués systématiquement et presque en permanence par nos penchants superstitieux. Alors, elle glisse très précautionneusement sa réponse très personnelle, au fond quasi-mystique, issue de son expérience, et qui trouve écho avec l'expérience de Job, dont elle est une spécialiste, et dont l'histoire constitue le grand livre de la Bible sur le problème du mal.

Ce sont cette authenticité, cette sensibilité, ce vécu fort qui crédibilisent terriblement son propos et laissent penser qu'elle a touché une part d'essentiel voire peut-être de vérité. Ainsi, sur de tels sujets, avec lesquels l'humanité – dont chacun de nous évidemment – se débat en permanence, ce livre constitue, à mon sens, une de ces petites lumières dont on a du mal à faire l'économie sur nos petites routes humaines souvent bien sombres. J'ai beaucoup aimé !
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