AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Lililaluize


Dès le commencement l'atmosphère de ce livre est comme suspendue, aérienne, Antonio Munoz Molina a opté pour les détails en masse, la répétition des situations afin que ce huit-clos de pensée intègre notre esprit faisant d'Abel un être sans la moindre parcelle d'ombre. L'Histoire se tisse lentement, très lentement rapportant les faits d'une guerre civile mêlés à une fuite, aux mouvements d'une rencontre amoureuse qui dès les prémices nous parait déjà contrariée à l'instar d'une époque.

Pour autant, ce choix narratif m'a paru justifié, mieux, il s'apprivoise. Rien n'est survolé , chaque phrase , chaque situation , chaque raisonnement nous mène en 1936 , en plein coeur de l'Espagne meurtrie et investi notre esprit tel le mitraillage d'un avion de chasse .Chaque minute est un recueillement dans lequel le silence berce les mots , nous pousse vers une progression , page après page , la flamme commence à poindre au milieu des tensions embrasées tout comme l'étincelle d'une passion prend vie sous nos yeux.

L'auteur pointe du doigt entre autres le fascisme d'un mouvement politique existant en 1936 , mais Munoz Molina y allie la chaîne d'une dictature toute autre , la passion , qu'elle soit amoureuse ou idéologique , menant à la destruction d'autrui , à cette autorité mensongère qui en efface jusqu'à la moindre parcelle de discernement , recouvrant l'honnêteté d'un voile de lâcheté , le déni , le mensonge. Ne reste que la jouissance d'une propre politique personnelle, considérant tout ce qui en est extérieur, famille y compris comme "mineur".

La grande phrase du fascisme "« Tout par l'État, rien hors de l'État, rien contre l'État ! » pourrait être " tout pour ma passion, rien en dehors de ma passion, rien contre ma passion !"

La déchéance, la destruction, voilà ce que Munoz Molina aborde, et ce par tous les fronts et avec un talent qui n'est plus à prouver.
Des faits politiques , une tension , une guerre ,une fuite, quitter un pays, le nôtre avec les remords de ne pas se battre pour lui, la nostalgie de ce qu'il était, d'une famille, des lieux, un amour .Des pensées altérées par l'horreur , des odeurs nauséabondes, des cadavres, des visages et le tout retranscrit aux travers des lignes admirables et d'une justesse remarquable de Munoz Molina.

Un très grand livre.
Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}