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Critique de Sachenka


Ça y est ! J'ai réussi ! Je suis passé au travers de cette oeuvre monumentale qu'est L'homme sans qualités ! Tout un défi que je me suis lancé et, après les quelques 1700 pages, je n'en suis pas peu fier. J'ai pensé à en reporter la lecture à plus d'un moment mais j'ai persisté. le premier tome de ce pavé de Robert Musil s'intitule : « Une manière d'introduction ». On y découvre Ulrich qui déambule dans la ville. C'est un jeune homme sans situation et, s'il n'est pas un moins que rien, il ne brille pas non plus et ne se distingue nullement. Il a un peu d'argent mais surtout des relations qui lui seront utiles. À part cela… Vers la fin du roman, Ulrich en convient et lance : « […] nous ne sommes rien, tous autant que nous sommes ! »

Cela résume assez bien le protagoniste tel qu'il était au début. Puis, dans le deuxième tome, après la mort de son père, Ulrich se rapproche de sa soeur Agathe. Les deux développent la relation qu'ils n'ont jamais eue (presque incestueuse). Ils en profitent pour butiner d'un salon à un autre, de celui de Clarisse et Walter, des amis intimes, petits bourgeois, à clui de Fischel et de sa famille, le directeur de banque, à celui, enfin, de leur cousine Diotime et de sa clique, dans lequel on retrouve son mari le secrétaire d'État Tuzzi, le comte Leinsdorf, le général Stumm, l'homme d'affaires allemand Arnheim et plusieurs personnages influents de Kakanie (Kaiserlich und Koniglich, soit « impérial et royal, faisant référence à la double couronne de l'Autriche-Hongrie).

Dans ces salons, on discute de tout et de rien. le plus souvent, de rien. Parfois, on aborde des sujets d'actualité comme le monstrueux assassinat d'une prostituée commis par Moosbruger, qui permet à tous d'échanger sur la santé mentale et la psychologie. Évidemment, l'avenir du pays est aussi longuement discuté. La guerre, la paix, la diplomatie, l'administration, les peuples non-germaniques intégrés à l'empire, les arts, la philosophie, la religion, les juifs et le judaïsme, la nature humaine, etc. C'est surtout l'occasion pour Musil d'étayer ses théories, ses points de vue sur un nombre infini de sujets. Sous cet angle, son roman ressemble davantage à un essai. Un vraiment long essai. Par moment, je me croyais de retour dans mon cours de philo au collège…

Bref, Ulrich et ses amis parlent beaucoup mais il ne s'y passe pas beaucoup d'actions. le général Stumm résume assez bien l'intrigue : « Nous nous étions tous habitués déjà à l'idée que rien ne se passait, mais que quelque chose allait se passer ! » D'ailleurs, le deuxième tome de ce pavé s'intitule : « Toujours la même histoire ». Hasard ? Je ne crois pas. Parfois, quelques événements se produisent et on espère que cela débouchera à plus (comme le désir de divorce d'Agathe ou l'évasion de Moosbruger) mais non. Les personnages reprennent leurs places dans les salons… Ils en deviennent presque ridicules.

Dans le premier tome, Ulrich s'était trouvé un emploi assez important dans l'Action parallèle, un sorte d'organisme qui visait à promouvoir l'unité au sein de l'empire austro-hongrois. de par ce fait, il se trouve mêlé à des missions obscures et il est souvent en lien avec le général Stumm et d'autres personnages influents. Mais il n'en découle pas grand chose. Que du vent ! D'ailleurs, l'Action se révèle inefficace et inutile, tout espoir de paix disparaît alors que le pays semble se diriger vers la Première Guerre mondiale.

L'homme sans qualité se veut un portrait de la société viennoise du début du 20e siècle. Une société en pleine décadence qui court à sa perte. Robert Musil y a consacré les dernières années de sa vie – d'ailleurs, le roman est inachevé, et même près de la moitié du deuxième tome a été couchée sur papier à partir des notes de l'auteur – et probablement sa santé, il vivait dans la pauvreté et le manque de reconnaissance. Dans tous les cas, cela est changé : il a légué un immense chef d'oeuvre, classé parmi les 100 meilleurs livres du siècle. Pas facilement abordable, j'en conviens, mais riche.
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