AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de mesrives


IRAN 2010-2011

Ispahan deux femmes sont successivement assassinées selon le même modus operandi : étranglées avec leur foulard, un bouquet de tulipes en soie déposé à leur côté comme une signature.
Téhéran, le journaliste franco-iranien Tarek Djamshid, de retour au pays trente ans après la chute du Shah, est convoqué aussitôt arrivé en ville par le Ministère de l'Orientation Islamique (l'ershad) qui lui conseille d'aller fourrer son nez du côté de la capitale des Safavides où un serial killer semble sévir: deux victimes du milieu musical iranien, la première Roxana, une ex-star de la pop iranienne des années 70, la seconde Nadia, une jeune musicienne de 19 ans.

A Ispahan la psychose grandit dans la gente féminine. Mona Shiraza, gynécologue obstétricienne dans un dispensaire de quartier défavorisé, est très émue et troublée. Roxana était une amie d'enfance, Nadia était une patiente. Pour cette militante des droits de l'Homme, ces assassinats sont choquants. de plus, elle est hanté par les paroles d'un refrain d'une des chansons de Roxana: « Dans un royaume où les ignorants sont rois, un homme a volé la voix des femmes. Il a emporté leur chant, semé des tulipes sur leur chemin, et la joie s'en est allée. »

La Brigade criminelle, dirigée par Abas Velami qui ne se sépare jamais de sa profileuse, occupée par un trafic d'opium s'en détourne assez vite attirée par ce nouveau fait divers qui fait la une des journaux et, qui devient de plus en plus mystérieux: une troisième artiste s'est volatilisée, disparue, mais le corps n'a pas été retrouvé et pas de traces de bouquet de tulipes.

Dans un Iran conservateur et répressif dirigé par Mahmoud Ahmadinejad (2005-2013), les protagonistes de ce Dernier refrain à Ispahan regrettent les années du mollah réformateur Mohammad Khatami (1995-2005) marquées par l'épanouissement de la société civile ainsi que de la vie culturelle. L'occasion pour Naïri Nahapétian de dévoiler la face cachée de la République Islamique: la présence omniprésente des Pasdarans les gardiens de la Révolution, les détournements d'argent, la corruption, les violations des libertés,la drogue ...

Une plongée dans la condition des femmes en Iran, une vision de leur quotidien quelque soit leur âge, leur origine sociale ou leur diversité culturelle. Une intrigue qui nous mène hors des sentiers battus: découverte du milieu artistique underground avec ses excès (sexe, drogue), visite de services sociaux et, pour toile de fonds les nombreuses étendues de la corruption: détournement du Zayandeh Rud (« celui qui donne la vie ») au profit des « apparatchiks » du régime afin d'irriguer leur propriété, trafic de stupéfiants, tortures dans la prison d'Evin...

J'ai beaucoup apprécié la délicatesse avec laquelle Naïri Nahapétian brosse sa galerie de portraits féminins, en douceur avec tendresse et sensualité. Dans Dernier refrain à Ispahan, Mona est le porte voix de toutes les femmes, leur étendard, elle sera de la partie pour élucider cette affaire.
J'ai aussi aimé me promener dans Ispahan, dans les quartiers des communautés minoritaires, à Djolfa avec les Arméniens mais aussi dans le vieux quartier juif. Un réel plaisir de déambuler dans un Iran qui peut être tolérant.

 Dans un royaume où les ignorants sont rois, un homme a volé la voix des flots. Il a emporté leur eau, semé des tulipes dans leur lit, et la joie s'en est allée...

Une lecture agréable, plaisante, à l'image de son auteur, rencontrée au Festival Toulouse Polars du Sud . On y ressent l'attachement pour son pays d'origine qu'elle a quitté à l'âge de 9 ans.
Une nouvelle voix qui nous permet d' en écouter beaucoup d' autres.
Un polar au parfum oriental.

Quant à moi, je n'ai plus qu'à prendre la direction de Téhéran pour rejoindre le reporter Tarek Djamshid pour sa première affaire Qui a tué l'ayatollah Kanuni?
Un autre polar au pays des mollahs.

A savoir qu'une chronologie succincte agrémentée d'un lexique des termes arménien et persan accompagnent le lecteur pour mieux situer le contexte dans lequel évoluent les protagonistes.
Commenter  J’apprécie          777



Ont apprécié cette critique (65)voir plus




{* *}