Quand on est jeune, on ne comprend pas. La vie passe si vite, un jour on se retourne et on est là, dans l'ultime impasse.
C’est terminé…J’ai rencontré un homme et il est tout ce que tu n’as jamais été.
Un poids lui pesait sur la poitrine, juste en dessous du sternum : l'idée qu'il n'avait pas de talent, qu'il était incapable de créer. Il maîtrisait la langue, aucun doute à cet égard - n'y avait-il pas voué son existence, et avec succès ? Pourtant, un doute s'insinuait en lui, dans le noir : il n'était jamais qu'un équilibriste des mots, un accordeur de piano, un vulgaire maquilleur. A quoi bon de belles phrases, si elles ne communiquaient rien d'important, la vérité sur la vie, si elles n'élevaient pas le particulier au niveau de l'universel ? Il n'était pas doué d'imagination, c'était un morne réaliste, aussi terre à terre qu'un plant de pomme de terre. Je suis un professeur d'allemand, pensa-t-il, pas un conteur ; pas un Barsch.
Barsch qui n'avait pas fait d'études secondaires et était à peine capable de nouer les lacets de ses souliers, et encore moins d'écrire un mot sans fautes, avait été béni par la main de Dieu, alors que lui, qui avait pris soin de sa langue comme de son bien le plus précieux, comme de l'enfant qu'il n'avait jamais eu, et qui nourrissait pour seul et modeste espoir de voir un jour le fruit de son imagination imprimé avant de quitter ce monde un sourire de bonheur aux lèvres, n'avait pas été doté du moindre soupçon de don de la narration qui lui permît de satisfaire ce désir insatiable dont le Tout-Puissant l'avait affligé.
La langue, ou ce qu’il était convenu de qualifier de style, les intentions de l’auteur et leur mise en œuvre, tel était son domaine. C’était un tailleur de pierre visant la perfection, coup de ciseau après coup de ciseau, un maître de l’art du stuc mettant la dernière main avec la spatule. (…) il se cantonnait à la musique, celle de la grammaire et du choix des mots, et y maniait la plume comme un chef d’orchestre sa baguette.
Lorsqu’il vit enfin les clochers de la Mariahilferkirche se dresser au-dessus des toits, il sentait déjà l’odeur des croissants frais dans les boulangeries, et pensant à son bien-aimé Sperl, il perçut au loin la triste mélodie de la charrette du marchand de lait, si ténue qu’elle aurait bien pu être imaginaire – cette sonorité qui d’habitude le berçait et lui permettait, au cours de ses nuits d’insomnie, de trouver le sommeil ave l’image d’une tasse de café au lait gravée au revers de ses paupières.
C’est un formidable outil que le mot. Dans les mains d’un maître [...], c’est une arme redoutable. Les écrivains sont des sirènes qui murmurent leurs chants à l’oreille des gens en leur promettant d’accéder à leur royaume. Ils sont porteurs de dangers et de tentations prohibées, ils incitent les lecteurs à s’aventurer dans des eaux périlleuses. Ils sont à redouter.
Il a besoin de calme et de tranquillité. C'est bon pour lui de se reposer sur une routine, car il est très sensible et son travail est très exigeant.
– Vous aimez beaucoup ses livres ?
– Comment le savoir ? Vous croyez que j'ai le temps de lire ?
(pages 304-305)
la littérature attirait surtout les femmes que la beauté avait épargnées. (page 332)
[…] et, quand on a une bibliothèque bien pourvue, on n'est jamais pauvre. (page 285)