Veena est une prostituée comme tant d'autres qui vit dans « La Ruelle », dans un taudis. Elle a eu une fille dont elle ne voulait pas et pour nier son existence, vue l'absence d'avenir qui la guette, elle ne lui a même pas donné de nom.
A 9 ans, l'enfant qui a grandi tant bien que mal dans cet univers sordide, rabrouée par sa mère, mais un peu choyée quand même par les autres prostituées, observe derrière une fente, dans le réduit où elle est cachée pour ne pas susciter la convoitise de hommes, ce que ceux-ci font subir à sa mère, telle une fourmi, qui passe inaperçue. Elle décide de s'appeler Chinti, c'est-à-dire fourmi.
Dans la maison d'en face, vit Sadhana, jeune homme transgenre qui a dû fuir sa famille maltraitante (il est une honte pour eux !). Recueillie par d'autres « Hijra » comme elle, elle se fait émasculer… ce qui donne une scène terrible. Sadhana s'attache à la petite fille.
Shivnath est un homme de Dieu, un Swami, qui entre jeûne et ascèse va voir les prostituées et Veena et sa colère lui plaisent bien, quel plaisir de les dompter ! mais, il est plutôt du genre « fou de Dieu » et pédophile : quand il voit Chinti pour la première fois, il en tombe amoureux, (traduire pas la mettre dans son lit, bien sûr). Tellement mégalo qu'il s'est fait construire une statue gigantesque (le représentant lui-même bien sûr) dans son temple où l'or coule à flots. Il si bien su manipuler les gens, surtout les riches que tout le monde le craint.
Pour arriver à ses fins, après des travaux d'approche qui lui ont permis de faire croire à la fillette qu'il lui prête l'attention que sa mère ne lui porte pas, il décide de prouver à tout le monde qu'elle est une réincarnation de Kali et il organise un pèlerinage à Bénarès pour le prouver à tout le monde et surtout arriver à ses fins.
Quand le danger s'approche de Chinti, Veena et Sadhana avec leurs compagnes de misère vont unir leurs forces pour empêcher le pire.
J'ai choisi de découvrir ce roman car l'Inde est un pays que j'aime malgré son système de castes, le statut qu'elle réserve aux femmes, des transgenres, ses inégalités depuis des lustres. Et, on ne peut pas dire que les choses se soient arrangées pour elles avec l'arrivée au pouvoir d'un intégriste hindouiste. J'aime ce pays dont je connais un peu quelques régions, mais je ne baigne pas dans l'angélisme à son sujet.
Ce roman m'a saisie aux tripes, j'ai ressenti la colère de Veena, et aimé sa transformation au cours des évènements, j'ai eu envie de trucider maintes fois ce religieux cinglé pédophile qu'est Shivnath… Les intégristes de tout poil me hérissent, ce n'est pas nouveau et on en trouve hélas dans toutes les religions. « La religion est l'opium du peuple » comme l'a dit si justement qui vous savez…
Le statut (enfin l'absence de statut) des Hijras m'a beaucoup touchée et notamment le personnage de Sadhana, sa vie, sa souffrance et sa capacité d'amour. On se sent proche, en tant que femme, de ce qu'elles vivent ainsi que les prostituées, tandis que résonne, comme un cri de guerre,
le rire des déesses, joli titre soit dit en passant…
Ananda Devi décrit très bien la situation des femmes dans ce pays, avec une écriture imagée, on sent les odeurs, l'encens, les fruits autant que les ordures, on perçoit la ferveur lors du pèlerinage vers Bénarès et la purification dans le Gange et à côté ces pèlerins qui ne perdent jamais une occasion de profiter des prostituées. Où sont passées la dévotion ? La purification ?
Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce roman et la plume de son auteure dont je lirai probablement les autres livres si ma PAL me la permet.
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