AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Cannetille


Situé au confluent des courants, l'un froid, l'autre tiède, du Labrador et du Gulf Stream, mais aussi des masses d'air, glacées ou plus douces, venues de l'Arctique et de la mer, le petit archipel français de Saint-Pierre-et-Miquelon est souvent battu par les vents, la pluie et la neige, quand il n'est pas perdu dans les brumes dont les habitants collectionnent les noms presque comme les Inuits les mots désignant la neige. La brume de Capelans survient au printemps, annonçant l'arrivée dans les parages des bancs de poissons du même nom, en même temps que la fuite de ceux des habitants déprimés par la perspective de plusieurs semaines d'une visibilité à moins d'un mètre.


C'est plus précisément sur l'île De Saint-Pierre que, retranché du monde depuis un grave traumatisme, le capitaine Coste, personnage bien connu des lecteurs d'Olivier Norek qui ont pu le suivre dans quatre précédents romans, exerce de nouvelles missions classées secret défense depuis sa résidence surveillée et protégée comme un bunker. Comme une poignée d'autres de par le monde, il prend en charge les personnes qui changent d'identité et disparaissent pour échapper aux représailles des criminels qu'elles ont dénoncés. On vient ainsi de lui confier une jeune fille retrouvée dix ans après son enlèvement, et qu'il doit protéger et faire parler pour tenter d'inverser la traque dont elle – et lui par ricochet - sont maintenant l'objet.


Quoi de plus terrifiant que la conscience d'un danger dont on ignore le visage et les ressorts, qui plus est coincé dans un isolement qui pourrait bien s'avérer à double tranchant ? Pour Coste, il y a bientôt de quoi se sentir aussi vulnérable que derrière une vitre éclairée sur la nuit noire, quand il lui faut vite comprendre dans quelle partie il est engagé, à quel ennemi il a à faire, avant de se faire débusquer comme un lapin aveugle. Alors que le mystère ne fait que s'épaissir à mesure de ce que la jeune Anna laisse échapper, que le trouble grandit face à la monstrueuse dualité de personnalités diaboliquement dangereuses, les signes que cette retraite insulaire pourrait rapidement se transformer en souricière s'unissent à l'approche longuement annoncée de ces épaisses et aveuglantes nuées de brumes qui achèveront de refermer le piège sur l'île et ses habitants, pour faire monter une angoisse teintée de claustrophobie.


Peaufinée dans ses moindres détails avec une précision sérieusement documentée et un réalisme – même si Coste lui-même verse un peu trop dans le genre « surhomme » pour rester totalement crédible - nourri de sa propre expérience de capitaine de police judiciaire, l'intrigue aussi retorse qu'efficace est menée sur un rythme haletant qui réserve bien des surprises et n'exclut pas l'humour, notamment au travers de personnages secondaires dont la cocasserie contraste agréablement avec la noirceur de l'ensemble.


Alors, que vous ayez lu ou non les précédents opus de la série Coste, vous ne pourrez que dévorer ce page-turner vraiment réussi, tant pour son suspense savamment entretenu que pour son originalité et son ambiance oppressante, ancrée dans le décor âpre d'un archipel synonyme de bout du monde, et étudiée pour renforcer la sensation d'enfermement aveugle au centre de la narration. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
Commenter  J’apprécie          1036



Ont apprécié cette critique (99)voir plus




{* *}