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Critique de Beatrice64


"Une histoire de guerre véridique n'est jamais morale. Elle n'est pas instructive, elle n'encourage pas la vertu, elle ne suggère pas de comportement humaniste idéal, elle n'empêche pas les hommes de continuer à faire ce que les hommes ont toujours fait. Si une histoire vous paraît morale, n'y croyez pas. Si à la fin d'une histoire de guerre, vous vous sentez ragaillardi, ou si vous avez l'impression qu'une parcelle de rectitude a été sauvée d'un immense gaspillage, c'est que vous êtes victime d'un très vieux et horrible mensonge. La rectitude n'existe pas. La vertu non plus".

Enrôlé à 22 ans dans la guerre du Viet-Nam, l'auteur (pas encore écrivain), ne veut pas y aller, ne veut pas partir de chez lui, a peur, ne veut pas mourir, ne veut pas tuer, mais ne veut pas décevoir sa famille et la collectivité à laquelle il appartient, fuit, hésite, tremble, part, se retrouve jeté dans une guerre dont il ne veut pas. Et revient, toute innocence perdue.

Hommage aux hommes cachés sous la tenue de GI, A propos de courage, fait des souvenirs de O'Brien, est un livre de guerre qui finalement ne parle pas de la guerre elle-même mais de l'impact qu'elle a dans la conscience des hommes qui la font, par la souffrance et la folie qu'elle génère ; de la dimension surréaliste dont elle est faite (la splendeur étrange de la jungle, l'irruption de la mort) ; de ce qu'elle détruit en chaque homme (le soldat tué par O'Brien). Dans ce livre, peu de scènes de guerre, pas de scènes de carnages. Mais des vies explosées, noyées, dans un quotidien fait de peur, de bruit, de fascination, de confusion ; des hommes effrayés en mode de survie. Et ce qui émerge de tout ça, c'est l'importance et le pouvoir du récit dans ce chaos, rédemption pour O'Brien, réconfort pour les soldats au coeur de la jungle, même si la morale et la vérité ne sont pas au rendez-vous.
Un livre doté d'une grande force d'évocation, à la fois poétique et lucide, subtil et puissant, fait de boue et d'humanité.

Un dernier extrait pour preuve : "Le jour, les francs-tireurs leur tiraient dessus ; la nuit, c'était les coups de mortier ; mais il n'y avait pas de batailles, seulement une marche sans fin, de village en village, sans but, sans rien perdre ou gagner. Ils marchaient pour marcher. Ils cheminaient lentement, bêtement, penchés en avant pour résister à la chaleur, sans penser, tout de sang et d'os, simples grogneurs, combattant avec leurs jambes, grimpant sur les collines et redescendant dans les rizières, traversant les rivières, remontant, redescendant sans cesse, toujours en train de se coltiner des choses, un pas, puis un autre, puis un autre, puis un autre encore, mais sans volonté, sans intention, parce que c'était automatique, c'était de l'anatomie, et la guerre n'était qu'une question de posture et de transport, se coltiner était tout, une sorte d'inertie, une sorte de vide, une lassitude du désir, de l'intellect, de la conscience, de l'espoir et des sentiments humains"
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