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Critique de Albertine22


le dernier roman de Maggie O'Farrell me fait penser à une boule à neige. Comment ? Vous n'établissez pas le lien entre une boule à neige et les verts pâturages de la couverture ! Imaginez une maison blottie dans la campagne du Donegal, protégée du monde extérieur par douze portails, abritant Daniel, un linguiste et Claudette, une actrice. Les deux tourtereaux roucoulent, de même que leurs enfants. du vieux relais de chasse s'échappent des mots doux ou violents, anglais, français, gaélique, des gazouillis de bébé, des bégaiements de garçonnet, des chansons de fillette. Voyez-vous où je veux en venir ? Suivez mon imagination fertile. Visualisez dans une boule une maison cocon, entourée de vert et éclairée par un ciel changeant. Renversez-la et de minuscules mots vont flotter de façon aléatoire dans l'eau, créant et recréant des bouts d'histoires. Admirez, c'est juste beau.

L'auteure réussit le tour de force d'écrire un roman foisonnant de mots, multipliant les personnages, les points de vue, les époques sans pour autant dérouter le lecteur. Cette construction subtile nous offre un morceau de vie, extraordinairement dense et palpitant. La figure centrale est Daniel Sullivan, universitaire, linguiste renommé, qui dans sa chambre d'étudiant, épinglait des mots sur des post-it comme un entomologiste des papillons. Au début du roman, il est l'époux de Claudette, une femme au tempérament volcanique. Il doit peser chacun de ses propos pour ne pas réveiller chez elle l'envie de tout fracasser. Il s'y emploie, avec succès, quand une voix jaillit du passé. Elle s'échappe de la radio de la voiture qui amène Daniel à l'aéroport. Il doit retourner aux Etats-Unis pour les 91 ans de son père. Cette voix, c'est celle de Nicola Janks, au milieu des années 1980. Il apprend que cette femme, son premier amour, est morte peu de temps après cette interview. Daniel va prendre l'avion mais pas pour se rendre chez son père. Il va remonter le temps pour connaître la vérité sur les circonstances de sa mort. Au passage, il s'arrêtera en route pour revoir ses enfants d'un premier mariage, soustraits à son affection après un divorce peu équitable.

Cette quête est un des fils de la narration, l'un des plus nets sans occulter pour autant les autres. Nous découvrons finalement Daniel à travers le regard de ceux qui, de près ou de loin, ont des liens avec lui. Nous découvrons Daniel mais aussi chacun des protagonistes, Niall et Phoebé, ses grands enfants, Marithe et Calvin, les plus petits, Nicola et Claudette, les femmes qui l'aiment ou l'ont aimé, ses amis et ceux de ses compagnes. Maggie O'Farell les fait exister le temps d'un chapitre, trouvant les mots d'une demoiselle de six ans, d'un adolescent brillant, toujours à la merci de son bégaiement, d'un adulte n'ouvrant la bouche que pour dire l'essentiel et la vérité alors d'un autre ne le faisant que pour mieux séduire et tromper ses interlocuteurs.

Ce roman kaléidoscope et ses multiples facettes est pour moi un hymne à l'amour ( Merci Edith Piaf) et aux mots ( Merci Umberto Eco).
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