AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Andromeda06


Je n'ai lu qu'un seul livre de Joyce Carol Oates, un livre qui m'avait projetée dans l'intimité d'un grand malade psychopathe et qui m'avait grandement perturbée, mais dont j'avais aimé la plume. Il était donc logique que je revienne vers elle, sans trop savoir vers lequel de ses nombreux romans je me tournerai (d'autant que je m'en étais noté pas mal). C'est un peu par hasard que j'ai choisi "Ma vie de cafard", le titre et les thèmes associés étant attirants.

Un cafard, outre l'insecte, désigne également une personne qui moucharde ou dénonce. Dans ce roman, il s'agit de Violet Rue, gamine de 12 ans, témoin d'un événement accusant directement deux de ses frères du meurtre d'un jeune afro-américain. Comme le titre et le résumé de la quatrième de couverture l'indiquent, elle va cafarder, entraînant l'arrestation et la condamnation de ces derniers.

L'histoire se déroule en premier lieu à South Niagara, dans l'état de New York. Violet revient sur son enfance et sa vie de famille d'avant le drame, prend le temps de nous présenter chacun des membres : son père, que tout le monde craint et adore ; sa mère, dévouée à son mari et ses enfants mais malheureuse ; ses quatre frères et ses deux soeurs, tous plus âgés qu'elle. Une vie de famille tout ce qu'il y a de plus normale (ou presque), jusqu'à ce fameux jour où Hadrian Johnson se fait agresser et meurt quelques jours après de ses blessures.

Reniée par sa famille pour avoir dénoncé ses frères lors d'un moment de panique et de forte fièvre, Violet est recueillie par une tante et continue à nous raconter son histoire, désormais sa vie de cafard.

Rejet familial, violence, racisme, sexisme, abus sexuels, culpabilité, honte, vont bercer les vingt années qui vont suivre, toujours dans la peur de représailles et toujours avec l'espoir qu'on lui pardonne et qu'on lui demande de revenir...

Joyce Carol Oates nous entraîne dans une histoire sombrement initiatique, dans laquelle on aimerait prendre sous son aile cette gamine complètement perdue et rejetée, qui tente d'avancer et briller pour se faire pardonner, pour rentrer, pour retrouver sa vie d'avant, son insouciance, son enfance. J'ai souffert avec elle et perçu ses moindres ressentis, elle m'a beaucoup touchée.

Et la plume de l'autrice y est pour beaucoup, puisqu'elle sait nous raconter des choses moches de belle manière. Une plume qui a une âme, s'adressant directement au lecteur, lui permettant de s'impliquer dès les premières pages. Une plume sachant décortiquer la complexité des liens familiaux autant que les sentiments et la psychologie des personnages. Une plume qui dégage une certaine aura, rendant l'atmosphère ambiante pas toujours très confortable et pourtant captivante.

Joyce Carol Oates prend le temps de tout installer, les personnages, les lieux, le contexte socio-familial. Son histoire, tragique, ne nous laisse pas indifférents, tout comme ses personnages, fouillés et bien campés, qui nous touchent ou qu'on déteste profondément.

Roman noir, roman iniatique, roman psychologique, "Ma vie de cafard" est tout ça à la fois. Bouleversant, incandescent et intense, tels sont les premiers mots qui me sont venus à l'esprit en le fermant. J'ai beaucoup aimé, vraiment beaucoup aimé.
Commenter  J’apprécie          7720



Ont apprécié cette critique (77)voir plus




{* *}