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Critique de Sycorax


L'objectif de cet ouvrage est plutôt louable : secouer - sous la forme d'un pamphlet - le cocotier de la bienpensance ambiante.
Même si très orientée, j'ai trouvé cette lecture salutaire malgré tout, ne serait-ce parce qu'elle contraint le lecteur à un questionnement intense sur son environnement médiatique, elle le repousse dans des retranchements inédits (pour ma part et jusqu'alors, aucune lecture politique ne m'avait poussé à remettre en cause certains des réflexes de pensée que je pensais être miens).

Depuis que je suis adolescent, j'écoute France-Inter, France-Culture, je lis le Monde, le Monde diplomatique, L'Obs, Alternatives économiques, visionne les documentaires diffusés par France Télévision.
Pourquoi ce qui est véhiculé par ces médias ferait force de loi ? Pourquoi la seule raison appartiendrait à un petit groupe de personnes qui informe les millions de lecteurs, auditeurs, téléspectateurs d'une nation ?
Pourquoi la parole véhiculée par ces médias depuis de longues décennies (que l'auteur dénonce comme répondant à la parole sacrée de gauche) serait LA seule et UNIQUE parole ? Celle qui nous "dicte" de façon indirecte ce qu'il est de bon ton de dire, de ne pas dire, de penser, de ne pas penser.

Il n'est qu'à voir lors de certaines matinales de France-Inter (par exemple...) la façon dont étaient traités les invités dont le bord politique n'était pas raccord avec celui des interviewers (j'ai notamment le souvenir désagréable de l'agressivité ouatée de Pascale Clark il y a quelques années, sans parler des sorties d'Aymeric Caron sur le plateau d'ONPC) : l'auteur du livre a raison, c'est bien de lynchage médiatique qu'il est question et cela m'a toujours gêné.
Lorsqu'on se rend vraiment compte de cela, lorsqu'on croise certaines données, on s'aperçoit que tous les journalistes sont bel et bien nourris à la même matrice (et ce n'est pas être ni populiste, ni sympathisant de partis politiques extrêmes que de reconnaître cela !).

C'est vrai, après tout : notre système de pensée peut très bien être le résultat d'une manipulation basée sur une forme de répétition doucereuse (discours toujours identique mais déversé sous diverses formes).
Une manipulation qui ne serait pas forcément planifiée et réfléchie en haut-lieu (ce qui reviendrait à marcher sur les plates-bandes de la Théorie du Complot), mais distillée dans nos médias depuis des décennies.

A l'aide de nombreuses contradictions pointées par l'auteur, la démonstration s'avère souvent convaincante, étayée avec un talent certain.
Mais...
... aurais-je été victime d'une autre forme de manipulation à la lecture de ce livre ? Mon libre-arbitre aurait-il été mis à mal par quelques sophismes bien amenés ?
Serais-je victime d'un manipulateur qui me rangerait à sa cause par la mise en garde contre un plus grand projet de formatage des esprits ?

Car oui : pourquoi les seuls hommes politiques nommés voués aux gémonies par l'auteur se limitent à Hollande, Valls et Hidalgo ? Pourquoi la moulinette décapante de l'auteur ne vise que les hommes de gauche ? Dans un ouvrage dont la thèse se veut universaliste, pourquoi ne pas tirer aussi à boulets rouges sur la classe politique en général, indépendamment de son bord politique, surtout lorsqu'un chapitre est entièrement consacré aux petits privilèges des serviteurs de l'Etat ? (cooptation, népotisme, gros profits, gabegie, administration outrancière, etc...).

L'auteur est certes décomplexé, mais lorsqu'on se prononce au nom de l'objectivité la plus totale, lorsque l'on écrit sous une forme accessible au plus grand nombre en maniant le sarcasme et l'ironie dans le but d'ouvrir les yeux du lecteur, alors encore faudrait-il commencer - je pense - par faire soi-même preuve d'une honnêteté intellectuelle sans faille.
C'est regrettable, car à mes yeux, cela décrédibilise en partie les efforts de rhétorique engagés par l'auteur.

La lecture de ce livre est néanmoins intéressante car il nous est rarement donné de lire des choses remplies d'une telle hargne.

Je remercie Babelio et les éditions La Mécanique générale pour m'avoir permis de remporter ce livre dans le cadre de la Masse Critique du mois de mai 2016.
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