"Le but du gouvernement constitutionnel est de conserver la République ; celui du gouvernement révolutionnaire est de la fonder."
La République a triomphé, jamais ses défenseurs. Qui suis-je, moi qu'on accuse ? Un esclave de la liberté, un martyr vivant de la République, la victime autant que l'ennemi du crime. Tous les fripons m'outragent ; les actions les plus indifférentes, les plus légitimes de la part des autres, sont des crimes pour moi ; un homme est calomnié dès qu'il me connaît ; on pardonne à d'autres leurs forfaits ; on me fait un crime de mon zèle.
Il n'y a pas deux manières d'être libre : il faut l'être entièrement, ou redevenir esclave.
Il se doit de revenir également sur l’accusation de tyrannie : « Ils m’appellent tyran… Si je l’étais, ils ramperaient à mes pieds, je les gorgerais d’or, je leur assurerais le droit de commettre tous les crimes, et ils seraient reconnaissants ! Si je l’étais, les rois que nous avons vaincus, loin de me dénoncer (quel tendre intérêt ils prennent à notre liberté !) me prêteraient leur coupable appui ; je transigerais avec eux ! » Son raisonnement est le suivant : il défend la patrie, s’attaquer à lui, c’est attaquer la patrie. Il ne s’agit pas là d’un délire mégalomane, mais d’une profonde conviction que son rôle est de dénoncer les atteintes à la patrie, quel qu’en soit le prix.
« La République a triomphé, jamais ses défenseurs. Qui suis-je, moi qu’on accuse ? Un esclave de la liberté, un martyr vivant de la République, la victime autant que l’ennemi du crime. Tous les fripons m’outragent ; les actions les plus indifférentes, les plus légitimes de la part des autres, sont des crimes pour moi ; un homme est calomnié dès qu’il me connaît ; on pardonne à d’autres leurs forfaits ; on me fait un crime de mon zèle. Ôtez-moi ma conscience, je suis le plus malheureux de tous les hommes ; je ne jouis pas même des droits du citoyen ; que dis-je ! il ne m’est pas même permis de remplir les devoirs d’un représentant du peuple. » La méthode de destruction du gouvernement révolutionnaire est double : « ici on calomnie ouvertement les institutions révolutionnaires ; là on cherche à les rendre odieuses par des excès ; on tourmente les hommes nuls ou paisibles ; on plonge chaque jour les patriotes dans les cachots, et l’on favorise l’aristocratie de tout son pouvoir : c’est là ce qu’on appelle indulgence, humanité ».
Robespierre s’élève ici clairement contre les excès de la politique dite terroriste : il dénonce les arrestations et emprisonnements injustifiés contre les patriotes, autant d’actions qu’on lui impute personnellement.
« On s’est attaché particulièrement à prouver que le Tribunal révolutionnaire était un tribunal de sang, créé par moi seul, et que je maîtrisais absolument pour faire égorger tous les gens de bien, et même tous les fripons : car on voulait me susciter des ennemis de tous les genres. Ce cri retentissait dans toutes les prisons ; ce plan de proscription était exécuté à la fois dans tous les départements par les émissaires de la tyrannie. » (chapitre V)
Que peut-on objecter à celui qui veut dire la vérité, et qui consent à mourir pour elle ?
Ils m'appellent tyran... Si je l'étais, ils ramperaient à mes pieds, je les gorgerais d'or, je leur assurerais le droit de commettre tous les crimes, et ils seraient reconnaissants ! Si je l'étais, les rois que nous avons vaincus, loin de me dénoncer (quel tendre intérêt ils prennent à notre liberté !) me prêteraient leur coupable appui ; je transigerais avec eux !
Etrange projet d'un homme, d'engager la Convention nationale à s'égorger elle-même en détail de ses propres mains pour lui frayer le chemin du pouvoir absolu ! que d'autres aperçoivent le côté ridicule de ces inculpations ; c'est à moi de n'en voir que l'atrocité.
Il faut étouffer les ennemis intérieurs et extérieurs de la République, ou périr avec elle ; or, dans cette situation, la première maxime de votre politique doit être qu'on conduit le peuple par la raison, et les ennemis du peuple par la terreur. Si le ressort du gouvernement populaire dans la paix est la vertu, le ressort du gouvernement populaire en révolution est à la fois la vertu et la terreur : la vertu, sans laquelle la terreur est funestre ; la terreur, sans laquelle la vertu est impuissante. La terreur n'est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible ; elle est donc une émanation de la vertu ; elle est moins un principe particulier, qu'une conséquence du principe général de la démocratie, appliqué aux plus pressants besoins de la patrie. On a dit que la terreur était le ressort du gouvernement despotique. [...] La force n'est-elle faite que pour protéger le crime ? [...] Jusqu'à quand la fureur des despotes sera-t-elle appelée justice, et la justice du peuple, barbarie ou rébellion ? Comme on est tendre pour les oppresseurs, et inexorable pour les opprimés ! Rien de plus naturel : quiconque ne hait point le crime, ne peut aimer la vertu.
Que ce mot [de propriété] n'alarme personne. Ames de boue qui n'estimez que l'or, je ne veux point toucher à vos trésors, quelque impure qu'en soit la source. Vous devez savoir que cette loi agraire, dont vous avez tant parlé, n'est qu'un fantôme créé par les fripons pour épouvanter les imbéciles ; il ne fallait pas une révolution sans doute pour apprendre à l'univers que l'extrême disproportion des fortunes est la source de bien des maux et de bien des crimes, mais nous n'en sommes pas moins convaincus que l'égalité des biens est une chimère. Pour moi, je la crois moins nécessaire encore au bonheur privé qu'à la félicité publique. Il s'agit bien plus de rendre la pauvreté honorable que de proscrire l'opulence.
Il n'est pas nécessaire que je puisse acheter de brillantes étoffes, mais il faut que je sois assez riche pour acheter du pain, pour moi et pour mes enfants. Le négociant peut bien garder, dans ses magasins, les marchandises que le luxe et la vanité convoitent jusqu'à ce qu'il trouve le moment de les vendre au plus haut prix possible, mais nul homme n'a le droit d'entasser des monceaux de blé, à côté de son semblable qui meurt de faim.