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Critique de milan


milan
25 novembre 2016
Dites nous comment survivre à notre folie" est peut être le livre le plus bouleversant que j'ai lu." Ce n'est que maintenant que je suis sur le point de le finir, que le sens du titre m'apparaît pleinement, sans que je puisse pourtant l'exprimer ou l'expliquer. Ce sont quatre nouvelles, complètement différentes les unes des autres, dont le fil conducteur apparaît au fur et à mesure ,bien qu'il soit d'emblée évident qu'il s'agit de ....la folie.....mais tout au long , on se rend compte que c'est trop réducteur de s'en tenir à cette réponse. Dans la première nouvelle, racontée par un petit garçon, vers la fin de la guerre, dans un village isolé du Japon, il s'agit de l'"arrivée" d'un soldat noir américain dans ce village, en fait capturé après le crash de son avion. Il est retenu prisonnier dans le village, en attendant que les autorités de la "ville" décident de son sort. le petit garçon découvre un nouveau monde d'émotions, les siens, ceux de son père, son petit frère, les villageois. Ils les perçoit et décrit avec les yeux et les connaissances d'un pré-adolescent qui s'éveille à la vie de manière presque animale, où les sensations sont primitives, charnelles, voire parfois érotiques. ici, on "découvre" que les enfants ont une "psyché, une vision et une analyse très pointues et personnelles de ce qui les entoure. Ils ne sont pas émotionnellement passifs. Dans la seconde, le personnage principal, se retrouve dans un état d'esprit inédit, qu'il semble accepter avec plaisir, peut être après l'avoir longtemps recherché, et qui est le résultat d'un incident plutôt traumatisant( il a failli être "jeté" dans la fosse aux ours polaires dans un zoo). de là, l'"obèse" ( c'est comme ça qu'il est présenté tout le long de la nouvelle), évoque plus ou moins chronologiquement sa vie depuis sa relation désastreuse avec sa mère, son père disparaissant brusquement, mais surtout le chamboulement de sa vie après la naissance de son fils, handicapé mental. Il y est question d'un lien plus qu'intense entre le père et le fils, lien construit par le père,tant physiquement que mentalement jusqu'à l'aliénation , perçu uniquement par le père.....jusqu'au dénouement final....libérateur? . La troisième nouvelle est l'histoire d'un jeune homme qui raconte son premier job d'étudiant comme "garde" d'un musicien célèbre qui a un ami imaginaire, une sorte de poupon-kangourou. Ce dernier rend visite au musicien, à des moments précis, et le jeune homme est chargé de s"assurer que cette "apparition" ne pousse pas le musicien à se comporter de manière scandaleuse. L'ambiance est un peu similaire à celle des oeuvres de Haruki Murakami, une sorte de flottement dans un entre deux mondes, et c'est ce flottement, cette indécision entre croire et ne pas croire qui "perturbe le narrateur. Dernière nouvelle....la plus longue, la plus bouleversante, la plus intéressante, le bouquet final du livre, qui l'éclaire. C'est l'histoire d'un homme de trente cinq ans, alité dans une chambre d'hôpital, qui attend de mourir d'un cancer du foie. Au début, il est très difficile de comprendre de quoi il s'agit. Il raconte- ou pas- des souvenirs, -ou pas- de sa vie, crées ou réels, à une sorte d'exécutrice testamentaire, chargée de retranscrire mot à mot, ce qu'il considère comme une "chronique du réel". On apprend qu'en fait il ne souffre d'aucun cancer....l'écriture, avec le récit devient à chaque chapitre un peu plus conventionnelle, et on comprend petit à petit que cet homme, âgé de dix ans vers la fin de la guerre, a vécu des événements plutôt tragiques, qu'il a peut être transformés et expliqués à sa manière, déformant ainsi le sens réel de ce qui s'est passé ce 15 août 1945.J'ai toujours eu un peu peur d'entamer un livre de Oé, les sujets qu'il aborde ne semblent pas "faciles", mais pourtant, il y rend l'accès aisé, sans les simplifier, bien au contraire. L'impression à la fin de la lecture qu'il y a plus à creuser, à voir, à sentir.....à" ressentir" persiste longtemps. On se sent spirituellement grandi, et l'étroitesse de point de vue du quotidien, la notre, celle des autres devient insoutenable. Les descriptions - des lieux, ambiances mais surtout des sensations et des états d'âme- sont saisissantes, particulières, inédites pour moi, obligeant à lire très attentivement. Lecture dont il est très difficile de revenir.....une douleur exquise.
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