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Critique de Moovanse


« Me sont venus à l'esprit le toucher granuleux des terres sablonneuses, l'ondoiement de la marée ou l'obscurité des grands fonds que la lumière n'arrive pas à percer. Sa voix qui résonnait là, mouillée, venait coller à mes tympans. »

« La Mer » !
Un titre, tout court, tout seul, tout nu. La bretonne se déplie instinctivement et le désir s'emballe, puisque pour Elle, la mer, c'est son air, son souffle, son vivant. Elle prend ! … et forcement Elle se dit qu'elle va, une fois de plus, tanguer dans ce bleu tempétueux qui la grise, se cogner aux embruns chagrinés de sel, se mouiller les yeux d'un reste de soleil couchant amourachant la grève …

Et, Non ! « La Mer » de Yôko Ogawa, ne parle pas de mer, ou si peu :
Cette phrase, mise en en-tête, et ce soupir océanique : une brise échouée dans sa première nouvelle, un souffle de vent inspiré qui magnifie l' « instrument », lui offrant par là même sa musicalité, son âme et son unicité.
Ce seront quasiment les seules douceurs marines du livre … tant pis pour la bretonne, les cormorans et les sirènes, tant mieux pour ces fulgurances poétiques !

Alors d'autres horizons s'entrouvrent.
Moins larges, moins vifs, moins acérés.
Les espaces se resserrent, la discrétion s'installe, le pastel prédomine. Feutré. Fragile.
Un vol de papillon, une nymphe de libellule, un piaillement de poussin …

7 nouvelles.
L'écriture y est minutieuse, narrative, lente, presque détachée …
« La Mer », sous la plume nipponne, se tranquillise et devient Lac, silencieux, quasi-immobile. Surface lissée sans lyrisme qu'Ogawa éclaire savamment de petites « tâches de soleil tamisé », lumières inattendues, tendres et voluptueuses. Troublant.

7 nouvelles de consistance, de longueur et de qualité inégales à mon goût.
J'y retiendrai surtout
- l'incroyable originalité et le charnel de « Butterfly » (rendre « érotiques » et sensuels des caractères de machines à écrire … Qui y aurait pensé ? L'auteure l'a fait et de quelle manière ! D'un tremblement d'ailes de papillon, d'un frissonnement, d'un tâtonnement hésitant jusqu'au nectar … fondant !),
- le charme du « camion de poussin », nouvelle plus qu'émouvante, rencontre sublime de deux voix perdues dans leurs silences. Une délicatesse à laquelle j'ai facilement succombé, aussi légère qu'une libellule.

« La Mer », c'est pour moi au final des impressions contradictoires comme il est dit dans « Tendres plaintes » : « le tranchant et la douceur, la magnificence et la grâce, la pureté et l'ombre »,

l'ordinaire qui de temps en temps crée l'enchantement de l'extraordinaire.
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