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Critique de Osmanthe


La narratrice, Umi, est une fille de onze ans dont la mère est morte. Elle et son petit frère de neuf ans, Uil, sont d'abord hébergés pendant quelques temps dans la famille ascendante de leur mère. Puis leur père, Pak Mansik, qui n'a manifestement guère le temps et l'attention pour ses enfants, trouve un logement d'un confort pour le moins très limité. Très vite, il ramène à la maison une jeune femme, qu'il a rachetée au pavé. La belle s'ennuie, est d'humeur lunatique, parfois gentille et rieuse, plus souvent geignarde et ne voulant pas endosser un rôle de maman de substitution. A la suite de la pendaison de crémaillère arrosée, le voisin Monsieur Yi, un veuf, devine son premier « métier » et fait des allusions devant Pak…qui va dans la nuit battre sa partenaire. Les enfants, réveillés et témoins, ne sont guère surpris. La belle finira par partir. Dès lors, le père travaille au loin sur des chantiers de construction ne reviendra qu'épisodiquement, et les enfants sont de plus en plus livrés à eux-mêmes avec pour seules compagnies la télé et ses dessins animés et un voisinage assez âgé plus ou moins cassé par la vie (il y a ce Monsieur Yi, un veuf qui vit avec une femelle oiseau veuve comme il dit, des homosexuelles, un criminel, un médecin aveugle…). Umi va devoir prendre la responsabilité de sa vie et protéger son frère. Elle le fait avec courage, mais le ras-le-bol surgit de plus en plus fréquemment. Son frère, qui est un peu déficient mentalement, lui tape souvent sur le système, il sèche l'école, fugue, fait des bêtises avec un groupe de son âge. Elle s'entend réutiliser les expressions d'agacement de cette pseudo-mère éphémère. Quand une assistante sociale lui est désignée, elle s'arrange pour la mener en bateau, ne pas l'introduire dans le logement. Elle commence à battre son frère. Quand le père revient, il est aviné, et se met à tripoter sa fille. Un jour, Uil est mordu par la chienne du médecin. Les enfants ont faim...Elle va exiger de manger la chienne, qui attend pourtant des petits. Uil ne rêve que de s'envoler, son état se détériore, il délire, parle tout seul, tout le temps, et nous livre leur terrible passé, avec ce père indigne, un homme violent qui battait déjà leur mère…Dans le voisinage, les situations se dénouent aussi, pendant que l'oiseau de Monsieur Yi s'exprime de plus en plus, comme s'il voulait parler à tous ces gens…Peut-être pour exprimer cette détresse collective ?

Ce livre court, 130 pages d'assez gros caractères, nous raconte le drame de ces enfants victimes des violences conjugales, qui subissent et se trouvent prédisposés à reproduire implacablement les mêmes travers. C'est aussi le drame de la discrimination, du déclassement, de la perte individuelle et collective des repères. Ce texte se lit d'un seul jet. La qualité et la fluidité du style nous entraînent vers un tourbillon, un abîme de noirceur. L'auteur ne joue pas la carte du pathos, pas d'atermoiements, que du factuel, le déroulé implacable des jours sans avenir. Une oeuvre triste, déchirante, et encore une belle découverte de cette littérature coréenne, assez (positivement) exigeante je trouve, qui perce peu à peu en France.
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