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Critique de Unecomete


Première lecture commune avec Philisine Cave, Miss Léo, Hélène Choco, Sharon, Anne du blog des Mots et des notes ... Merci les filles d'avoir partagé ce livre avec moi :-)

J'ai eu beaucoup de mal à me mettre à l'écriture de ce billet. J'ai fini "Purge" il y a quelques jours mais impossible d'écrire immédiatement mon ressenti. Je l'ai lu pourtant assez vite même si rien ne pressait. L'urgence était ailleurs. J'ai terminé cette lecture avec soulagement et il m'a fallu un peu de temps pour la digérer, en parler autour de moi, y réfléchir, savoir si j'avais aimé ou pas...

En 1992, l'Estonie, longtemps opprimée, fête son indépendance et le départ des Russes. Aliide, une vieille estonienne, trouve dans son jardin"un ballot" a "l'air humain". le "ballot" est en réalité Zara, une jeune femme qui prétend être recherchée par "son mari".

Rien ne semblait devoir amener Aliide et Zara à se rencontrer. Entre elles, pourtant, un lien existe, qui ne se résume pas à la simple solidarité. En effet, la fuite éperdue de Zara va faire émerger du passé d'Aliide des secrets jusque là bien gardés. Aliide n'est seulement une pauvre vieille qui prépare des conserves et des médicaments. Elle a vécu la guerre, la violence, le mal... Zara, elle aussi, traîne derrière elle un lourd bagage. Au fil du roman, dont la construction repose sur une chronologie éclatée, les deux femmes se dévoilent.

Je peux le dire sans risquer de déflorer l'intrigue, les presque quatre-cents pages qui suivent la mise en place, longue et minutieuse, sont éprouvantes. Si le récit n'est pas linéaire, nous promène d'une époque à l'autre (1991, 1949, 1951...), d'un lieu à l'autre (Estonie occidentale, Berlin, Vladivostok...) il n'est pas pour autant difficile à suivre. Chaque chapitre est daté, les lieux clairement identifiés. L'histoire de l'Estonie, que pour ma part, je ne connaissais pas du tout, est heureusement balisée au début et à la fin du livre, par des cartes, des dates associées aux évènements. Non, la difficulté est autre.

L'atmosphère de "Purge" est pesante. Etouffante. Et ce dès les premières pages. L'écriture de Sofi Oksanen, d'une grande puissance, parvient à communiquer cette nausée au lecteur. Pendant presque toute ma lecture, j'ai été saisie à la gorge par ces odeurs sur lequelles l'auteur s'attarde : Zara "sent la peur à plein nez ". Plus loin "Martin avait toujours des restes d'oignon entre les dents, et il était de constitution robuste (...) les longs poils de aisselles étaient jaunâtres de sueur(...) ses pores étaient plein de graisse, dont l'odeur variait selon ce qu'il avait mangé (...) Elle essayait quand même de préparer des plats sans oignon". Seule Ingel, la soeur jalousée, est épargnée : " la sueur d'Ingel sentait la violette".

Le corps est central dans le roman. Ce corps que les hommes ne cessent jamais d'humilier, de torturer : « il venait toujours de nouvelles bottes de cuir chromé, toujours de nouvelles bottes, semblables ou différentes, mais qui avaient la même façon de marcher sur la gorge. Dans la forêt, les tranchées s'étaient refermées, les douilles ternies, les blockhaus écroulés, les morts à la guerre s'étaient décomposés, mais les événements déjà vus se répétaient. » Ce corps qui fait si mal et qu'il est nécessaire de purifier afin d'effacer l'horreur subie ou qu'on a fait subir...

Autant prévenir, de (trop) nombreux passages sont insoutenables. Cette complaisance dans l'abominable m'a profondément heurtée. Mais "Purge" ne se réduit heureusement pas à cela. C'est aussi un roman passionnant parce qu'il met en scène des personnages complexes, haïssables, dérangés, terriblement intéressants. On a du mal à s'attacher à eux, aucun n'attire la sympathie, -même les victimes ou supposées victimes-, mais ils fascinent. "Purge", c'est aussi le roman de la trahison, de la résistance, un roman sur les femmes, toutes générations confondues, sur le courage, la jalousie, l'instinct de survie, sur l'amour, l'amour furieux, l'amour absolu, celui qui conduit au pire.

de ce roman tellement dense, tellement dur, tellement âpre, à l'écriture pleine de douleur, de rage, où la douceur est quasi absente, (l'amour de Hans pour Ingel, la tendresse de la grand-mère apportent quelques petits souffles vite balayés) je suis sortie rincée, bousculée par des émotions contradictoires. Enthousiaste à certains moments, écoeurée à d'autres. Epouvantée souvent. Au final, je ne peux pas dire que j'ai aimé ce livre, il m'a beaucoup trop remuée. Il est juste de ces romans marquants, qui vous poursuivent longtemps après la lecture.


Lien : http://bgarnis.canalblog.com/
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