On n'enseigne ni ce que l'on sait, ni ce que l'on dit. on enseigne ce que l'on est. Jean Jaurès
Pourquoi s'étonner que la vie qu'on se remémore semble plus pleine que la vie quotidienne ? Les souvenirs sont du passé digéré, ce qui subsiste quand on a oublié. Les souvenirs, c'est du condensé, du meilleur comme du pire, du triste ou du rigolo, du laid ou du beau mais surtout du fort. Le mou du temps a passé à travers l'écumoire.
Á Brazzaville, le boy nous répétait ce qui se disait entre indigènes. Ce qu'il m'a dit un jour m'a profondément marqué. Il nous a dit "On vous laisse construire un grand lycée, on vous laisse rebâtir l'hôpital, et quand tout sera fini, on prendra l'indépendance". Personne n'y croyait, on disait "C'est qu'une histoire de boy", on se croyait les plus forts, et pourtant c'est bien ce qui s'est passé. Les constructions finies, ils nous ont foutus dehors.
Sommes-nous si différents des poissons migrateurs qui, après avoir sillonné les mers du globe, reviennent sur les lieux de leur naissance?
Une famille comporte une citadelle de souvenirs d’architecture complexe avec des tours, des murailles difficilement franchissables, des souterrains dont on a perdu l’entrée, personne ne peut en dresser un plan exact.
Les bonds technologiques et la sagesse seraient-ils antagonistes à court terme? L’attention portée à la maîtrise des objets techniques est-elle si vive qu’elle empêcherait toute mise en perspective? A croire que la technologie et la pensée se comporteraient comme deux fluides couplés et peu miscibles, l’un vif et l’autre lent, tels l’atmosphère et l’océan.
Le glissement mental d’une société, avec des jeunes en pointe qui avancent plus vite que leurs aînés, fait naître des fissures comme un glissement de terrain sous une résidence.