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Critique de Dixie39


Retour sur cette lecture hors norme : le manifeste incertain de Frédéric Pajak. Dans ce tome 2, l'auteur poursuit sa déambulation dans les rues de Paris, Venise ou Berlin. Walter Benjamin est toujours le fil conducteur de ce récit, qui entremêle souvenirs de l'auteur, considérations sur le présent, le passé et ce qui fait l'histoire... On a cette impression de suivre le déroulement de sa pensée, de ses réflexions, comme s'il nous racontait tout cela, accoudé au comptoir d'un troquet parisien. Paris ! Cette merveille que les édiles abîment, dénaturent, violentent... jusqu'à en faire une ville perdue, sans substance et sans âme.

Paris n'est plus ce qu'il était, du temps où Benjamin apprenait « à s'égarer dans les rues comme dans une forêt. » Ils ne sont plus en son coeur, ces Titis parisiens qui nous faisaient sourire ou râler, ces maîtres des rues, qui occupaient la place et se foutaient de nous, les « provinciaux » qui montaient à la Capitale, des petits cailloux d'espoir plein les poches, du temps où elle faisait encore rêver...

Maintenant, « à ceux qui ont de quoi l'acheter, Paris se vend de bonne grâce, mais sans un merci, sans faire risette. Et pour ceux que la vie abîme, mal logés, mal nourris, et qui savent trop bien qu'il ne donne rien pour rien, Paris est simplement, bassement, cruellement désespérant. Sans pour autant devoir en mourir, ils traînent leur détresse dans les rues, se heurtent à la nervosité des gens qui vont au travail, ou qui le quittent ».

Frédéric Pajak illustre cette pensée avec toute une galerie de têtes de chiens, tous au regard désespéré, implorant... Quand j'ai lu ce passage, il résonnait particulièrement avec l'actualité (qui n'en est déjà plus une, la dernière née chassant l'autre), un sourire naissant au coin des lèvres...
Berlin n'a pas plus de chance au grand jeu de construction des architectes contemporains. Seule Venise reste Venise...

Walter Benjamin s'éreinte toujours dans une errance éperdue, luttant contre le temps, le nazisme qui étreint et contamine de plus en plus de ses contemporains. Entre langueur et excès, il aimerait se débattre, mais ne sait comment.

Parler de Benjamin, c'est mettre en lumière cette autre histoire, celle que nous n'apprenons pas, que nous n'avons jamais apprise. Celle des petites gens, des circonstances, des hommes accidentels qui ont porté aux marches de la gloire, les soi-disant grands hommes ! Les vrais héros de l'histoire, ce sont eux ! Avalés par l'oubli...
Peut-on vraiment ressusciter cette histoire effacée ? Tout cela n'est-il qu'affaire d'éternelle ré-écriture et air du temps ?

Quant à lui, Benjamin « ne cède pas à la pression de l'actualité, et il s'en tient strictement à sa position de sentinelle d'une Histoire non révélée, une Histoire dont le présent est redevable du passé des vaincus. »

Ce tome 2 se clôt sur une demande de nationalité française, restée sans réponse.

« Benjamin a aimé Paris, qui l'a si peu aimé en retour. Et pourtant son nom restera attaché à la ville, dans ce qu'elle a de plus inavoué : son instinct d'utopie. »
Lien : http://page39.eklablog.com/m..
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