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Critique de LivresGay


Tiens, une histoire de confinement. « Manquait plus que ça », dirait l'autre, « on vient de s'en taper à répétition, des confinements, alors pas envie de les retrouver en bouquin. » Ou au contraire, comme dirait l'un : « Voilà un auteur qui sait capter l'immédiat, en termes de fond d'histoire. » Remarquez, l'auteur en question était (est ?) dans la comm' et le marketing, dans le civil, alors c'eût été décevant s'il n'avait pas trouvé une accroche « vendeur ».

Pas de crainte, par ailleurs – le confinement (le premier, de mars 2020, hein, celui qui a pris tout le monde de court) n'est pas davantage. Juste le fond devant lequel se déroule toute l'histoire, le décor, l'arrière-plan. Justement, puisque je dis « pris de court » – le premier personnage, Lior, un jeune San Franciscain, l'est en effet, tout autant que les autres Californiens, quand ça lui tombe dessus. Ce Covid qui se déclinait encore au masculin, car rien de plus qu'un virus lointain, frappe soudainement à toutes les portes du globe, et même le gouverneur de Californie se voit contraint de décréter : allez, zou, confinement pour tout le monde à partir de demain. Heureusement qu'un des amis de Lior possède une grande maison près du lac Tahoe. Il embarque donc petit copain fraîchement choisi et meilleurs amis, dont Lior, et c'est parti direction isolement de riche en pleine nature intacte. Les amis télétravaillent ; le propriétaire des lieux et son chouchou bullent, regardent Netflix, font la cuisine.

C'est là que Lior se met à avoir un rêve étrange. Une nuit, son inconscient lui invente une rencontre fortuite quoiqu'heureuse avec un certain Julian, employé de supermarché au regard hypnotisant. Ce qui distingue ce rêve de tous les autres, c'est son côté hyperréaliste, genre, c'est la Duane Hanson des rêves : plus vrai que nature. Presque plus vrai que la vie. Détail encore plus surprenant, ce rêve ne s'estompe pas au bout de quelques secondes ; il ne disparaît pas non plus dans le flux alterné conscient-subconscient-alterconscient, ce que l'on appelle communément vie éveillée et sommeil. Non, il se transforme en série à épisodes qui s'enchaînent, nuit après nuit. Après la rencontre, les deux hommes tombent amoureux l'un de l'autre, commencent à se côtoyer, à se construire une vie à deux, à faire des projets, à devenir… un couple ? Mais ce ne sont que des rêves, voyons ! Comment est-ce possible ? Puis, le confinement se termine enfin, le cours normal des choses va s'installer à nouveau, et Lior se résout à terminer cette relation onirique. Il sait qu'il ne pourra pas passer sa vie à rêver. Sauf que… la vie réserve parfois de jolies surprises.

Le livre se découpe en trois parties, deux principales et une que je qualifierais de conclusion heureuse. Évidemment heureuse ; ou vous préférez une romance qui se termine mal ? Pas moi. Enfin, passons. La première partie, donc, c'est l'histoire de Lior : SF, confinement, lac Tahoe, rêves, Julian, etc. La deuxième partie raconte, en revanche, l'histoire d'un certain Dorian, autre San Franciscain, employé de supermarché de son état (tiens, tiens), et son vécu du confinement à lui. Avec, là encore, d'étranges rêves à la clé… D'accord, je vous entends déjà dire : « Je le vois venir, là, l'auteur, il me ressert la même histoire, mais vue de l'autre bout. » Oui, sauf que ce n'est pas un bis repetita ennuyeux, car Dorian n'est pas Lior, justement. D'où des expériences différentes, un ressenti différent, une histoire différente.

Une trame assez originale, cette relation qui se construit par rêve(s) interposé(s). Malgré le côté supernaturel, elle tient debout, en plus ; on y croit, on la suit avec intérêt. Donc, pour ce qui est de l'histoire, je n'ai rien à dire, je l'ai trouvée intéressante, bien trouvée, bien construite, et ce premier confinement en toile de fond ajoute de l'actualité, donne cet aspect « connu ». On se surprend à penser, mais oui, le confinement, c'était ça, j'y étais.

Là où le bât blesse, pour moi, c'est le style. Car tout est raconté. Je sais, c'est toujours la même rengaine, avec moi, mais c'est vrai, entre raconter et montrer, il y a un fossé. La quatrième de couv promet « un roman […] comme un film ou une série Netflix » ? Seulement si ledit film ou ladite série était présenté(e) en synopsis uniquement, en audiodescription si vous voulez, pas en images. du coup, je suis resté sur ma faim, je n'ai pas pu me glisser dans la peau des protagonistes, je n'ai pas pu vivre leurs histoires comme si j'y étais. Dommage. Je n'ai pas été fan des nombreux anglicismes, non plus – pour ne citer qu'un exemple, je trouve cringeworthy, pour y aller d'un anglicisme à mon tour, de dire que deux personnes vont se dater (du verbe to date, « sortir avec »), surtout quand on ne met pas le mot en italique. « Dater » a une signification en français, et, nous sommes bien d'accord, hein, ce n'est pas la même.

Autres griefs, les erreurs de concordance, des erreurs de temps tout court (pourquoi des présents quand c'est écrit au passé simple ?), des erreurs d'orthographe. Puis, pour moi, petit problème de suivi de narration, on pourrait aussi dire, problème de point de vue. Dans la partie consacrée à Lior, c'est lui, le narrateur, alors je ne devrais pas avoir d'explication sur les raisons des actions et réactions de Julian (et vice versa pour la deuxième partie). Ça embrouille, ça fait fouillis.

Dernier point, le livre était trop court. du coup, l'évolution des personnages passe quelque peu à la trappe. Des étapes importantes sont vite expédiées par, là encore, des explications racontées, que l'on ne peut pas suivre de l'intérieur. Ainsi, les deux personnages, pour attachants qu'ils soient, restent un peu plats, un peu loin.

Dommage, car ce livre aurait pu donner un joli récit vraiment innovant et touchant. En l'état, je suis resté un peu en-dehors, même si j'ai pu déceler un très joli potentiel. Il me reste un deuxième livre de Florian Parent à lire ; à voir si je suis davantage conquis par celui-là.
Lien : http://livresgay.fr/retrouve..
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