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Citations sur L'air que tu respires (31)

Il est toujours plus facile de penser que les intentions valent autant que le résultat, mais ce n'est pas vrai. Le résultat, c'est tout. Le résultat, c'est ce qu'il reste et il faut vivre avec. P348
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Une souffrance commune peut unir deux personnes bien plus qu’un lien matériel
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Il y avait un instant à Lapa, juste avant le lever de soleil, quand les cabarets avaient fermé et que les visiteurs étaient rentrés dans leurs quartiers bien sages, ou les seuls sons qu’on entendait lorsqu’on déambulait dans les allées sombres provenaient des rodas. C’étaient les voix enrouées, les tristes et lentes mélodies. C’étaient les chansons secrètes, brutes de décoffrage et qui n’étaient pas censées voir la lumière du jour. C’était les chansons qu’on jouait quand toutes les autres avaient déjà chantées et que la nuit se résumait à un manque ; quand il n’y avait plus d’alcool, plus d’amis, plus de filles riant aux éclats, plus de cigarettes, plus de nourriture dans le ventre ou d’eau dans le verre, juste toi et un guitariste, seuls dans l’obscurité, oubliant tout sauf vos voix et les paroles d’une chanson bien enfouie au plus profond de vous, que vous avez toujours connue mais jamais partagée avant cet instant. Parfois, il y a des auditeurs insoupçonnés : une jeune mère à sa fenêtre, un couple emmêlé dans des draps, une jeune fille en pantalon et béret, les mains dans ses poches, les lèvres enflammées par de nombreux baisers, le corps délicieusement engourdi à des endroits qu’on lui avait toujours dit de ne jamais toucher. Elle s’arrête, entend la lamentation de la roda, et c’est comme si sa vie en dépendait. Comme si tout ce qu’elle avait vécu jusque-là – chaque raclée, chaque mensonge, chaque honte, chaque élan d’amour et chaque triomphe (aussi peu nombreux soient-ils) – l’avait menée ici, en cet instant, à portée d’oreille d’une chanson que personne n’était censé entendre. Le rythme l’enveloppe. La musique, tel un pré ou un lit douillet, est un endroit ou elle peut toujours se réfugier. C’est une maison comme nulle autre pareille.
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Graça n’était pas belle ; du moins, pas selon les normes en vigueur, à savoir comme quelque chose qui provoque soit du désir soit une envie de protection. Graça n’était ni voluptueuse ni délicate. Sa bouche, ses yeux, sa silhouette n’avaient rien d’extraordinaire. Mais si ces éléments étaient combinés à sa voix, son rire, son énergie brute et inextinguible, ses mouvements élancés, Graça devenait belle. À ses côtés, on avait le sentiment de participer à une incroyable aventure, à un destin qui avait du sens. Sa beauté ne résidait pas dans un trait particulier. Sa beauté se révélait à travers l’effet qu’elle produisait sur les gens – pareil à un shot d’alcool ou une ligne de coke. C’était comme un sort qui conférait intelligence, courage et amabilité, attributs dont on ignorait l’existence en nous-même avant qu’il nous les révèle.
J’ignorais tout ça lorsque nous étions enfants, bien entendu. Je m’en suis rendu compte bien des années plus tard, en voyant Graça dans son cercueil. Il était entouré de fleurs et Graça était allongée à l’intérieur, les yeux fermés et les bras croisés sur la poitrine. Elle portait une robe de soirée rouge et son rouge à lèvres rouge habituel, et pourtant elle paraissait étrangement ordinaire – une institutrice dans un costume d’actrice. Je me penchai vers elle, lui pinçai la joue. « Graça, arrête de plaisanter ! Lève-toi. S’il te plaît ? », murmurai-je jusqu’à ce que Vinicius m’éloigne.
Contrairement à Graça, je grandis en hauteur et non en rondeur. Mes chemisiers étaient trop courts ; mes jupes recouvraient à peine mes jambes tout à coup noueuses et peu coopératives. Je devais me pencher pour passer sous la porte de la cuisine. Les garçons d’écurie, les employés au moulin et même le senhor Pimentel devaient basculer la tête en arrière pour croiser mon regard. À Los Angeles, où nous vécûmes plus tard, faire un mètre soixante-dix-huit n’avait rien d’étrange au milieu de ces starlettes amazoniennes et de ces jeunes premiers bien charpentés ; mais pour le Brésil, j’étais plus qu’imposante. Adolescente, ma taille ne me dérangeait pas autant que les autres changements qui se produisirent dans mon corps. Ma poitrine était sensible et je fus horrifiée de voir des poils noirs me pousser sous les bras et entre les jambes. Les femmes de chambre et les filles de cuisine avaient des poils à ces endroits-là mais, sur elles, cela paraissait naturel. Joli, même.
À la fin de la journée, Nena renvoyait certaines filles à leur plan de travail parce qu’elles avaient oublié de bien nettoyer quelque chose.
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Les récoltes avaient toujours lieu en été, quand la terre est bien sèche. La rivière se tarissait, les routes craquelaient, l’eau avait un goût de terre. Mais les cannes restaient vertes et épaisses, leurs feuilles longues et coupantes comme des machettes. Marcher dans un champ qui n’avait pas encore brûlé, ce serait comme affronter un millier d’hommes. On serait découpé en morceaux. Ou mordu et tué par un serpent venimeux.
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Elle était douce, chaude, comme une petite boule de pâte que je pouvais facilement travailler avec mes doigts.
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Et qu’est-ce qu’une jeune fille laide pouvait offrir au monde hormis son corps ? J’appris donc à défendre mon corps, avec acharnement, contre les garçons d’écurie, les ouvriers du moulin ou toute autre personne voulant s’en servir à des fins personnelles. Et, en même temps, j’appris à me rendre utile, à obéir à mes patrons à tout prix ou, mieux encore, à ne pas les croiser. Tant que j’étais invisible, j’étais en sécurité.
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Elle se servait de ses poings pour m’inoculer des choses qu’elle ne pouvait articuler, des leçons qui me sauveraient la vie. Nena pouvait assurer ma sécurité dans la cuisine mais pas ailleurs. J’étais une créature sans famille et sans argent. Une autre bouche à nourrir. Pire encore, une fille.
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Chaque plantation avait une histoire de fantôme et la nôtre ne faisait pas exception : une femme s’était noyée dans la rivière et y vivait encore. Certains affirmaient qu’elle avait été tuée par son amant, d’autres par son maître, d’autres encore qu’elle s’était suicidée. Apparemment, on pouvait l’entendre chanter sous l’eau la nuit, soit pour son amant, soit pour attirer les gens dans l’eau afin de les noyer et de ne plus être seule ; les avis différaient selon qu’on croyait le fantôme gentil ou rancunier.
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Si les souvenirs nous ramènent à ce que nous sommes, alors l’oubli nous préserve de la folie ( page 345)
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