De l’intérieur ou vu de l’extérieur, le Japon transcende le clivage Orient-Occident. Il incarne la postmodernité, il la dépasse même, tant les post-modernes occidentaux, à la traîne, sont encore nombrilistes dans leurs référents philosophiques.
L'une des premières choses que font des Japonais se rencontrant pour la première fois, c'est d'échanger leurs cartes de visite. Ce geste, qui frappe beaucoup les étrangers, n'est pas autre chose qu'une pratique mutuelle d'étiquetage (professionnel, social...) permettant le bon fonctionnement de l'étiquette (niveau de politesse, de langage, d'intimité...). Malheur à la personne qui n'a pas son meishi (mot à mot la "pointe de son nom", c'est à dire sa carte de visite) : il ou elle se met aussitôt hors du champ, indiscernable, pas dans le coup.
A force d’être récurrente, l’évocation de la crise japonaise masque autre chose que la réalité nippone: la peur de soi-même pour l’Occident. Le Japon constitue un miroir de cette angoisse du futur à la fois immédiat et lointain. Ce n’est pas tant le Japon lui-même qui effraie, mais ce qu’il annonce. Le modèle disparait, le vide semble s’installer, que ne colmateront pas aisément les appétits de l’hyper-puissance américaine. Le Japon n’est même plus un repoussoir – le livre d’Amélie Nothomb [Stupeurs et tremblements] n’en est que le feu follet crépusculaire et les turbines du Pentagone se chargent de nous concocter un autre ennemi relevant du choc des civilisations – ni même le bouc émissaire qu’il avait pu incarner lors du « péril jaune » des guerres coloniales ou pendant la déferlante des produits « made in Japan ».
L’insertion économique du Japon dans le monde est acquise depuis longtemps. Son insertion politique n’est pas forcément à la hauteur de cette puissance, mais il n’est pas sûr que son actuel alignement et son engagement militaire pro-américain accrus s’opèrent en faveur de la paix, de la sienne ou de celle du monde. En partant du constat que leur culture s’est diffusé partout dans le monde, des mangas aux sushis en passant par le judo ou le karaoke, les Japonais peuvent saisir que leur propre culture contient des éléments d’universalité. En les déclinant à l’intérieur de l’archipel, comme à l’extérieur, ils les propulseront comme ingrédients de l’humanité. Il ne manque pas, dans leur propre histoire, leur propre socio-culture, d’avancées de démocratie directe et de libertés pour qu’ils se passent de recettes toutes faites. Le Japon a connu la leçon de l’ultranationalisme, il peut donner l’exemple d’un nouveau cosmopolitisme.
En japonais, Nihon ou Nippon : « racine (origine) du soleil ». Le nom de Japon a été introduit en Europe en 1513 par le récit du diplomate portugais Tomé Pirès. Il est probablement issu du malais Japun, qui lui-même provient d’une déformation cantonaise du chinois mandarin Zipanguo, lequel avait déjà donné Cipango chez Marco Polo au début du XIVe siècle.