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Critique de fabienne2909


Camille de Peretti livre, avec « le sang des mirabelles », sa vision du Moyen Âge dans un roman aux allures plus vraies que nature. Deux jeunes soeurs, Eléonore et Adélaïde, arrivent au château du seigneur Guillaume Ours, à l'occasion du mariage de la première avec celui-ci. Ce mariage, qui survient six mois après la mort de la première femme de Guillaume, est, comme souvent au Moyen Âge, un accord politique : Guillaume obtient la garde des terres et donc partie de la puissance du seigneur Lion, en contrepartie de quoi il protègera Adélaïde jusqu'à ce qu'elle soit en âge de se marier, puisque son père part accompagner le roi Neuf à la Guerre sainte. Décision prise par le roi pour expier sa faute, celle d'avoir fait incendier l'église des Mirabelles dans laquelle se trouvaient femmes et enfants, lors d'un assaut mené contre le seigneur de cette province…

De ce premier sang versé injustement découlera bien des malheurs, comme une malédiction : Eléonore la salamandre, la jeune fille aux yeux d'or, glace Guillaume dès les premiers instants de leur union. Elle découvrira l'amour, mais avec Robin Rossignol, le troubadour de la cour ; Adélaïde, l'Abeille, jeune fille attachante et intrépide, se liera d'amitié avec l'apothicaire du village, le vieux Hibou, qui lui enseignera ses connaissances en pharmacologie et en médecine, ce qui lui sera reproché par sa belle-soeur Cathaud, l'Araignée, une femme aigrie et méchante qui n'aura de cesse de la harceler, aidée en cela par le chapelain du château, un jeune homme pervers qui, ayant été repoussé par Adélaïde, voudra se venger... le tout dans un contexte de guerres de territoires se rapprochant inexorablement.

Le destin de ces deux jeunes filles fières, indépendantes et au caractère bien trempé, sera rendu plus étroit et considérablement obscurci par les hommes, à l'instar de leurs congénères : toutes les femmes de ce roman, à l'exception peut-être de la vile Cathaud (c'est plutôt elle qui martyrise les autres, et notamment sa chambrière Manon dans une relation de domination plutôt sordide), ont la vie rendue dure par les hommes, qu'elles soient soumises par la force, battues, violées, méprisées… La vie d'une femme devait servir à contenter les hommes qu'elles le veuillent ou que ceux-ci se servent sans gêne. Les frontières entre amour et abus m'ont souvent paru bien minces. On est loin d'un roman courtois !

La violence est ainsi quasiment omniprésente dans le roman, et quelques scènes sont même difficilement soutenables, en raison d'une chasse aux sorcières qui a lieu durant le roman, ce qui m'a un peu gênée, car le roman me semble contribuer par là au cliché d'un Moyen Âge synonyme d'obscurantisme. Ce qui constitue d'ailleurs l'un des bémols que j'aurais envers la crédibilité du roman : la période durant laquelle l'action se passe n'est pas précisée, mais la mention des croisades pourrait dater l'action entre 1095 et 1291 (dates des premières et dernières croisades), soit entre les XIe et XIIIe siècles. Or, les premières chasses aux sorcières ont début au XVe siècle, et jusque là la société était plutôt tolérante à ce sujet.

Malgré cela, « le sang des Mirabelles » constitue un splendide roman, avec ses intrigues imbriquées, la richesse des situations sociétales (qu'est-ce qui est attendu d'une alliance entre seigneurs, les guerres féodales, les croisades, la vie quand on est une femme, une servante au Moyen Âge, entre autres) décrites dans une langue qui fait la part belle aux mots et expression de l'époque. Une jolie découverte.
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