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Critique de CasusBelli


Michel Peyramaure nous a quitté le 11 mars 2023 à l'âge respectable de 101 ans, il restera pour moi l'un des meilleurs auteurs de romans historiques que j'ai lus.
Avec les "prisonniers de Cabrera", il aborde un sujet peu présent dans la littérature historique, celui des prisonniers de guerre et plus précisément ici, ceux des guerres du Premier Empire et les fameux pontons de sinistre mémoire.
Le talent de Michel Peyramaure, c'est, pour commencer, cette façon d'installer le contexte, politiquement et militairement, j'ai beaucoup appris sur une période que je croyais très bien connaître, le fait est que j'avais en fait de sérieuses lacunes sur cette "campagne" d'Espagne.
Il faut dire que pour ce pan de l'histoire en particulier, les sources françaises font défaut contrairement aux nombreuses sources espagnoles et anglaises, on comprend pourquoi en lisant ce livre qui donne une image déplorable de la soldatesque française en terme d'exactions et de brutalité et qui explique en partie l'animosité espagnole à notre égard aujourd'hui encore.
Sous couvert d'autoriser le passage des troupes françaises en Espagne pour aller combattre les anglais au Portugal, Napoléon va en fait en profiter pour installer un nouveau roi sur le trône ibérique, un proche de préférence, et pourquoi pas son propre frère Joseph ?
Cela dit, si l'Espagne n'a plus que l'ombre de la puissance qui était la sienne, le peuple lui, est attaché à la religion et à son roi fantoche. Très vite, l'occupation française qui ne dit pas son nom va se heurter d'abord à une franche hostilité, puis à une véritable insurrection.
Les troupes françaises sont a priori supérieures en nombre et mieux équipées, cela dit, les espagnols n'offriront que peu de batailles, préférant une guérilla tout terrain qui va user et vaincre les français.
Nous suivrons dans ce roman le capitaine Puymèges, aide de camp du général Dupont, fait prisonnier à la bataille de Baylen. Quatre années d'internement, d'abord sur les pontons de Cadix, puis sur l'île de Cabrera dans les Baléares du côté de Majorque, un épisode méconnu de l'histoire qui, derrière l'aspect romancé, se révèle précis sur le plan historique.
Les pontons, imaginez un internement sur un bateau délabré et impropre à naviguer, celui-ci ancré suffisamment loin des côtes pour dissuader même le meilleur des nageurs. Imaginez le surpeuplement, la crasse et la malnutrition, les ravitaillements aléatoires et la nourriture insuffisante, une promiscuité délétère et des gardiens qui vous haïssent en tant qu'envahisseurs et mécréants. Si vous imaginez tout ça, alors vous avez une idée assez précise de l'enfer vécu par les détenus qui sont morts par milliers en Espagne d'où on estime que 200 000 hommes ne sont pas revenus.
Une lecture fascinante, parfois émouvante, notamment au travers des anecdotes sur les années passées à Cabrera où la vie s'est organisée tant bien que mal, espoirs d'évasion, désillusions, puis résignation.
L'auteur nous livre ici une fresque historique de qualité, avec ce talent et cette belle plume qui rend la lecture si aisée et agréable, un bon moment de lecture.
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