Le manque de repères se ferait sentir au bout d'une dizaine de kilomètres. Elles allaient devoir compter sur la chance pour découvrir d'anciens chemins. Les vues satellites montraient quelques minces pistes mais il était impossible de savoir s'il s'agissait de réels sentiers ou juste de vulgaires passages d'animaux errants.
A cet instant, Stella sut ce qu'elle devait faire. Elle attendit que le son finisse de retentir, puis recommença une seconde fois. Elle prit une profonde inspiration et souffla une troisième fois. Elle venait de produire une complainte venue du fond des âges, voyageant comme un écho à travers l'espace et à travers le temps.
"Moi, Joachim, aujourd'hui et pour la première fois, je vous conduis seul sur la muntanera. Je jure de vous protéger quels que soient les dangers rencontrés. Nous cheminerons ensemble dans les vertes vallées jusqu'aux hautes montagnes où l'air est si pur que l'herba santa pousse dans l'azur."
Leur déplacement était bien moins douloureux que dans les ronces mais, au bout de plusieurs heures d'efforts, elles se sentirent épuisées. En arrivant sur les bords d'une magnifique vasque, elles décidèrent de s'accorder une pause. L'endroit était idyllique. Le vert émeraude de la végétation, l'éclat évanescent des reflets sur l'eau et le murmure de l'onde qui jouait sur les galets donnaient au lieu une ambiance presque irréelle.