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Critique de NanouAnne25


Un jour, après avoir proposé à une classe une sortie en forêt, une élève m'a répondu : « Je ne vais pas en forêt ; la forêt, c'est la loose » Cette remarque m'a laissée sans voix. Je me suis interrogée sur les raisons qui pouvaient pousser cette jeune fille à sortir ce genre de propos. Une vie hyperconnectée ? Un besoin constant d'être sur son téléphone ? Car c'est sûr, en forêt, le réseau ne fonctionne pas vraiment correctement. C'est d'ailleurs ici un paradoxe : ce qui sera dérangeant pour certains (l'absence de réseau en forêt) se révèlera justement avantageux pour d'autres : ce besoin de coupure, de break, d'apaisement, de ressourcement. Pour ma part, quand je vais en forêt, c'est ce que je recherche. D'ailleurs, dans son essai, Jean-Philippe Pierron propose de parcourir la nature avec ses 5 sens. Et lorsque la marche est terminée, se questionner ainsi « Que puis-je en tirer de bénéfique pour la suite ? »

Dans cet ouvrage, « Méditer comme une montagne », l'auteur nous propose une réflexion sur les exercices d'attention en lien avec l'écologie. Ce peut être par exemple prendre conscience de nos écogestes, comme ouvrir et fermer un robinet, trier ses déchets, questionner ses nourritures. Il nous invite aussi à porter un regard différent sur notre habitat : considérer notre planète comme un don et non comme un dû nous poussera à pratiquer davantage la reconnaissance.
« Sans doute que le travail spirituel qu'appelle la transition écologique se tient là : se débarrasser de notre souci d'exercer une emprise sur la Terre pour être en prise avec elle, en tant que fils ou filles de la Terre (adam, en hébreu) ».

Le sous-titre du livre, « exercices spirituels d'attention à la Terre et à ceux qui l'habitent » peut questionner. le terme spirituel est aujourd'hui associé au monde religieux. Et la religion, elle a souvent tendance à faire fuir et à révolter au lieu d'attirer. Alors l'auteur replace le mot « spirituel » dans sa définition première : le terme renvoie d'abord et surtout à tout ce qui relève de l'esprit, la pensée, cette impulsion qui nous fait dire et agir. Dans le cas qui nous occupe, notre rapport spirituel à la Terre s'oppose à notre rapport charnel à celle-ci. Ou en d'autres termes, la réflexion sur la Terre face à la consommation de celle-ci. Cette idée m'a plu. « Il importe d'apprendre à faire la part en soi entre besoin, envie et désir » rappelle l'auteur. Aujourd'hui, il est très facile d'être occupés à consommer. En revanche, prendre le temps de réfléchir et de faire attention aux beautés qui nous entourent demande un effort. « Comme il y a une gymnastique du corps, il y a une gymnastique de l'âme, nous dit l'auteur. Les dispositions intérieures se travaillent et nous travaillent. » Il pointe du doigt un problème majeur : l'économie de l'attention. Un problème omniprésent.

L'auteur s'interroge, il nous interroge aussi : « Au fond, qu'est-ce qu'être un habitant de la Terre ? ». Bien sûr, cela soulève des questionnements spirituels d'ordre religieux et moral : si l'on a été placés sur la Terre, si nous y sommes locataires, ne sommes-nous pas tenus de la respecter, de la garder en état de fonctionnement ? Cette dimension spirituelle est évoquée mais non approfondie dans cet essai, car l'objet du livre n'est pas du tout de ramener le sujet à Dieu.

Les essais sont aussi l'occasion d'enrichir sa culture générale. Ici, j'ai découvert une oeuvre qui m'était inconnue, le Rainbow Swash, la plus grande peinture monumentale puisqu'elle recouvre une citerne de stockage de gaz liquide à Boston. L'artiste se nomme Corita Kent. Jean-Philippe Pierron utilise l'artiste et son art pour introduire son chapitre sur l'importance des exercices d'attention.

Voilà, je vais m'arrêter là. J'ai pris beaucoup de plaisir à cette lecture. J'écris cet avis en ce dimanche 19 février après-midi. Il fait beau, presque chaud, je profite du soleil qui darde ses rayons sur mon visage. Alors je vous laisse, je vais tranquillement continuer ma médiation sur mon balcon.

Ps : l'auteur est philosophe. Alors attendez-vous à enrichir votre vocabulaire de quelques mots nouveaux et à devoir faire l'exercice de conceptualiser quelques notions abstraites.
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