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Critique de Biblioroz


Ces derniers jours, je me suis coulée dans l'univers de Pia, cernée par des petites phrases si simples, si belles, si poétiques, si vivantes et débordantes d'énergie que j'en ai encore le tournis. Je me suis laissée prendre dans ce tourbillon de mots, de verbes précieusement choisis et assemblés pour faire éclater les images qui jaillissent de l'univers de cette exploitation laitière, dans une petite ferme de Charente.

Chez Pia, vous y trouverez la fragilité du sourire de Joël, le poids de sa bosse et ses saluts sur le bord de la route. La 4L piquée de rouille conduite par le papa dont la voix entonne inlassablement Io sono un povero negro. Mademoiselle qui occupe aux beaux jours le château d'à côté, une autre vie ordonnée et silencieuse. Les cris de ses trois soeurs et de son frère, l'éphémère d'une grande fratrie. Les corvées de tous les jours avec le ronron des trayeuses, les vaches aux pis gonflés pour remplir le tank à lait. La force des biscoteaux pour transformer la crème battue en belles mottes de beurre. Les herbes sèches jetées dans la botteleuse.
Vous apprendrez à cueillir en douceur les orties pour ne pas qu'elles se vengent.
Vous devinerez les vestiges des origines italiennes qui ressurgissent à travers les clapotis de la polenta et les « porca miseria » à chaque coup dur. Et les coups durs planent avec la politique d'écrasement des petits producteurs pour donner les moindres miettes du gâteau aux tout-puissants qui contrôlent cultures et élevages. Ils se cachent aussi derrière les emprunts au Crédit Agricole, sous les blessures de la grande sécheresse de 1976, dans le hameau qui se dépeuple lorsque l'au-revoir aux anciens arrive, inévitablement.

Et tant, tant de choses encore, tous les restes de l'enfance perdue au milieu des champs.

Une toile de fond égrène les années 70 avec ses feuilletons, ses chansons, son odeur de chicorée et ses petits biscuits à messages. Souvenirs, souvenirs.

Ce n'est pas une grande histoire mais un chapelet de petits riens, de petits faits qui remplissent les jours puis les années d'une enfance à la campagne. Une enfance dont les gestes, les élans, s'effacent tout doucement pour d'autres horizons.
En savourant chaque phrase, j'ai trouvé beaucoup d'émotions tapies derrière ces orties et derrière ces hommes sur cette terre de Charente, dure mais attachante.
Paola Pigani a su en faire des explosions de tendresse, en toute simplicité, comme celle-ci :
« À la maison, la polenta est prête. Maman a préparé un gâteau. Elle roule l'amour des siens dans la farine. Le chagrin de nous avoir loin d'elle pendant des jours, elle le pétrit et l'aplatit comme elle peut. »
Je n'ai pas résisté, j'ai adoré !
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