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Critique de PGilly


C'est d'abord un couple indéfectible, pétri d'une connivence joyeuse. Elle et lui piquent du nez lors de séminaires et de colloques pompeux. Ils contournent l'obstacle en lançant des promenades sociologiques à travers Paris, agrémentées de pique-nique fraternels.
À deux, les sociologues unis forment un collectif de recherche. Ils signent toujours leurs travaux de leurs deux noms, ce qui irrite le CNRS payeur. le jour de leur retraite (2007), ces iconoclastes balancent leurs archives dans onze grandes poubelles vertes de la ville. Ils refusent aussi le titre de chercheur émérite. Les voilà frais et disponibles pour affûter leurs traits. Seuls maîtres à bord, ils peuvent adopter une approche plus ouvertement critique à l'égard des positions sociales dominantes, instituées et transmises au sein de la noblesse et de la grande bourgeoisie françaises. Récemment, ils ont concentré leurs recherches sur N.Sarkozy et E.Macron, présidents des riches et des ultra-riches.
Auparavant, ils ont observé, rencontré, conseillé parfois, un milieu clos, au cours de cocktails, de dîners, de week-ends au château, de rallyes huppés, de remise de médailles. Leur statut de couple marié représente un passeport précieux aux yeux d'une classe sociale pour laquelle "l'institution familiale est au coeur du dispositif de reproduction de génération en génération."
Monique et Michel font flèche de tout bois. Ils flairent les champs d'investigation propices à l'analyse de la façon la plus incarnée possible des modes de fonctionnement d'une classe sociale "profondément mobilisée dans des stratégies d'enrichissement et de pouvoir afin de conserver ses privilèges sans ruissellement pour les autres." Effectivement, les auteurs sont proches des communistes, non encartés. Mais leur humilité et leur écoute ouverte séduisent des interlocuteurs aux antipodes de l'univers des Pinçon-Charlot.
Michel et Monique pratiquent la sociologie de terrain, biberonnés aux textes de Bourdieu sur la reproduction sociale. Chasse à courre, beaux quartiers, dynasties familiales, essayage de tailleurs Chanel, autant de terres à défricher, à ausculter, à révéler (même en bande dessinée) au grand public. Ils constatent la transformation d'un capitalisme industriel de type paternaliste en un capitalisme néo-libéral et financiarisé encore plus favorable aux riches. Les chiffres de la répartition des fortunes mondiales sont édifiants. La pandémie a creusé les inégalités, avec une augmentation de 30% du montant des 500 fortunes professionnelles de France en 2020.
La lecture des mémoires (condensées) d'un couple de sociologues est stimulante, intéressante et amusante. Les auteurs alternent le récit à la troisième personne, en je, en nous et même en "Tu". L'ouvrage confirme l'extrême violence d'une classe sociale soucieuse de préserver ses privilèges au détriment des moins nantis et des plus démunis.
J'ai rarement lu de la sociologie aussi accessible. Mais surtout, j'ai été touché par la ténacité d'un couple soudé dans l'amour et le travail.
Lien : http://cinemoitheque.eklablo..
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