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Critique de Ellane92


Un homme est découvert la gorge tranchée dans sa jolie maison du Country Club La Maravillosa, quartier privatisé et surveillé (par des postes de gardes surveillant les entrées et sorties) pour nantis, où tout est fait pour le repos de l'âme et la santé du corps. Ca ressemble à un suicide, sauf que l'épouse de cet homme nouvellement décédé avait été retrouvée morte 3 ans auparavant, dans les mêmes conditions. A l'époque, tous les regards concernant la mort de l'épousée s'étaient tournés vers le mari, mais aucune preuve de sa culpabilité n'avait pu être trouvée.
Le quotidien El tribuno s'empare de cette affaire, et couvre ce meurtre/suicide au travers de l'approche maladroite du "gamin des faits divers". Ce dernier a été embauché en remplacement du célèbre journaliste Jaime Brena qui, ayant eu l'heur de déplaire à son rédacteur en chef, se retrouve à la tête de la fabuleuse rubrique société, écrivant des articles sans importance sur des sujets frôlant le ridicule... Quoiqu'il en soit, le rédacteur en chef indélicat demande à son ancienne maitresse, Nurit Iscar, Betibou de son surnom (car présentant une certaine ressemblance avec Betty Boop), une écrivain autrefois célèbre qui vivote en servant de petite main aux excentriques qui veulent écrire leur vie, de s'immerger dans le country club et d'y raconter de la fiction, pour alimenter le journal. Jaime, incapable de se tenir à l'écart, avec ses contacts toujours dans la poche, se rapproche du petit jeunot qui le remplace.

J'ai vraiment aimé ce Bétibou, un petit roman relatant l'enquête menée par deux journalistes différents mais complémentaires et un auteur. L'écriture de C. Pineira est simple, instructive mais pas démagogique, et nous dépeint une certaine société de l'Argentine moderne relativement peu connue, trempant tour à tour sa plume fine et élégante dans l'ironie, la férocité, l'extravagance, la tolérance, la bienveillance ou l'humour. L'avancée de l'enquête est plutôt lente, ce qui permet au lecteur de prendre son temps pour découvrir les personnages savoureux qui prennent vie sous nos yeux (Bétibou est un très beau portrait de femme, et l'on croirait ses amies tout droit sorties d'un film d'Almodovar !), leur histoire, leur environnement. Les dialogues, sans ponctuation ni identification de l'interlocuteur, sont percutants, et cette façon de procéder donne un certain cachet au texte.
De nombreux sujets sont évoqués au cours de ces 400 pages. Sous couvert de nous raconter l'investigation liée à la résolution d'un meurtre dans un country club, il me semble qu'une bonne partie du texte, décontextualisée, peut très bien s'appliquer à de nombreux pays, et de nombreuses époques. Par exemple, quand je pense "Argentine" et que je lis : "Quand on ne prête aucune importance aux atrocités passées, elles laissent des plaies ouvertes et, pire encore, il est certaines personnes qui s'arrogent parfois le droit de réparer ce que la justice a en son temps laissé impuni. Il n'empêche que cette justice rendue à titre personnel constitue une nouvelle atrocité qui alimente un cycle infini de haine et de vengeances. Est-il moins assassin que les autres, celui qui tue quelqu'un qui mérite de mourir ?", ça ne m'évoque pas immédiatement la résolution d'une enquête par deux journalistes et un écrivain. Mais après tout, chacun trouvera ce qui le touchera dans un texte !
Une belle découverte.
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