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Critique de kuroineko


L'Arbre-Monde renvoie à divers mythes sur le grand Arbre originel tel Yggdrasil dans la mythologie nordique ou même l'Arbre de la Connaissance de la Genèse.
A son tour, Richard Powers crée un univers autour de l'arbre. Ou plutôt des arbres. Et comment nous, bipèdes arrivés tellement longtemps après eux, nous comportons avec eux. Hélas, le constat fait mal. Et c'est aussi un appel aux consciences que ce vaste roman.

Divisé en plusieurs parties - racines, tronc, cime, graines - le roman présente dans la première huit personnages comme autant de nouvelles d'un recueil. Ou d'essences à travers le pays. Chacune de ces personnes vit dans un État différent des États-Unis, a des origines et suit un parcours qui lui sont propres. Pourtant l'arbre est déjà présent. Comme ce châtaignier qui devient le phare emblématique de la ferme des Hoel ou le mûrier planté par le père de Mimi Ma pour rappelé son origine d'immigré chinois qui s'enracine dans la terre américaine.

Ces huit personnes vont se retrouver avec un point commun : la prise de conscience douloureuse de la disparition à une vitesse croissante des forêts originelles du pays. L'industrie veut toujours plus de bois et des arbres présents depuis des siècles sont menacés par les chaînes des tronçonneuses et des puissantes machines d'abattage, au nom du Dieu Profit.
Des associations de défense s'organisent pour empêcher ce massacre sylvestre. Et c'est ainsi que certains de nos personnages font connaissance, rassemblés par une cause commune plus grande qu'eux (dans tous les sens du terme).

Richard Powers déploie tout son talent dans cette vaste fresque autour de la sylve. Son roman fourmille de passionnantes informations sur les arbres et comment ils communiquent, se défendent et nouent de véritables autoroutes synaptiques sous terre avec leurs racines et tant d'espèces diverses qui travaillent ainsi en symbiose. L'auteur a abattu un remarquable travail de recherches sur son sujet. Tout comme je salue la qualité des champs lexicaux utilisés autour de l'arbre et des humains, les englobant par des termes soigneusement choisis dans une seule et même famille dont les seconds devraient apprendre à regarder et comprendre les premiers plutôt que de n'y voir que des utilités mis à la disposition de sa voracité consumériste.
Si l'apport de tous ces éléments demandent une lecture concentrée afin d'en tirer toute sa "substantifique moelle", la lecture n'en est que plus enrichissante et ouvre les yeux sur des systèmes biodivers d'une incroyable efficacité. Et tout ça tend à disparaître sous le coup des tronçonneuses, des maladies, du réchauffement climatique, etc. Il y a de quoi s'inquiéter en lisant ce livre, reflet romanesque de toutes les sonnettes d'alarme que tirent les scientifiques et spécialistes de tous domaines en rapport avec l'environnement.

Devrons-nous dans trop peu de temps nous contenter de photographies dans les livres ou sur Internet pour nous rappeler ce qu'était un chêne ou un pin ou toute autre essence? Fini d'être bercé par le doux bruissement des feuilles jouant avec le vent, murmures folâtres qui me sont si chers lors de mes lectures en extérieur? La conclusion qu'apporte Patricia Westerford, biologiste en dendrologie et amoureuse passionnée des arbres, de ce livre offre une révélation sous forme de claque magistrale quant à l'avenir des relations entre la sylve et l'humain. Je vous laisse la découvrir par vous-mêmes, en plus de toutes les autres richesses de ce beau et grand roman.
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