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Critique de dannso


J'ai découvert que Richard Powers avait publié un nouveau livre grâce à la magnifique critique de Chrystèle. Richard Powers est un écrivain hors normes qui mêle dans ses livres, science et émotion de manière magistrale. C'est un magicien qui parvient à nous partager des notions scientifiques que nous ne comprenons pas forcément de façon rationnelle, mais auxquelles nous parvenons à nous confronter et à intégrer par l'émotion qui y est attachée.
Dans ce nouveau livre, il nous raconte quelques mois de la vie de Théo et de son fils Robin : Robin, prénommé ainsi, car le rouge-gorge était l'oiseau préféré de sa maman. Était au passé, car Alyssa est « non pas décédée, mais morte » quelques années plus tôt dans un accident de voiture. Elle était militante écologiste.
Robin est hypersensible, différent, son père « n'a jamais cru aux diagnostics posés sur son fils. Quand une pathologie se voit attribuer trois noms différents en autant de décennies, quand elle exige deux sous-catégories pour rendre compte de symptômes absolument contradictoires, quand en l'espace d'une génération elle passe de l'inexistence au statut de maladie infantile la plus diagnostiquée du pays, quand deux médecins veulent à eux seuls prescrire trois traitements différents, c'est qu'il y a un problème. »
Théo est astrobiologiste : il recherche la vie sur les planètes lointaines. Il modélise des scénarios de développement de vie et attend le Guetteur, super télescope dont le déploiement permettrait de recueillir des données qui pourraient corroborer l'existence des mondes qu'il a créés, formes de vie à chaque fois plus étranges, plus différentes de celles connues. En attendant, il les a consignés dans le guide Byrne et offre à son fils de les parcourir ensemble. Ce sont les histoires du soir qu'ils partagent tous les deux, explorations de mondes surprenants, qui remettent en cause nos manières de penser.
Théo, contraint par une société très normative et policée, pour ne pas donner de traitements chimiques à son fils, son « triste et singulier garçon » va le faire participer à une thérapie expérimentale : grâce à une cartographie des différentes émotions dans le cerveau, le sujet de l'expérimentation apprend à contrôler ses émotions en tentant de faire coïncider les images de son cerveau avec celles d'émotions positives. Ce traitement va donner des résultats probants et Robin va développer son empathie envers le monde. Non sans en souffrir, car le monde est dans un triste état.
Fidèle en cela à ce qu'était sa mère, Robin va de ses faibles moyens se battre contre la disparition des espèces, le désastre écologique en cours. le monde tel qu'il est décrit dans ce livre n'est hélas pas très différent du notre et l'auteur se livre à une critique féroce de la société américaine, où même la théorie de l'évolution est remise en cause (on peut y visiter « le musée de la création divine et de l'Arche de Noé »), où le président a tous les droits et même celui d'abattre des milliers d'hectares d'arbres en représailles parce qu'il les juge responsables d'incendies, où tout un chacun est fiché et peut être arrêté s'il dit ce qu'il ne faut pas, où la science est coupable de couter trop cher et sacrifiée. Et des milliers d'espèces ont déjà disparu ou vont disparaitre prochainement. Cette vision fait froid dans le dos.
Mais ce roman, en dépit de cet avenir sombre qu'il brosse, est resté pour moi lumineux, illuminé par l'amour, l'amour incroyable que se portent ces deux êtres, ce père et ce fils. Ce père qui doute de lui, qui a peur de faire des erreurs et qui en commet sans doute, ce père resté seul à élever ce fils différent, m'a profondément émue. Il a aimé sa femme comme un fou, il aime son fils également, et lui crée un environnement magique, partageant avec lui de multiples mondes, ne refusant jamais de lui parler, découvrant la nature avec lui, le laissant vivre ses expériences. Leurs échanges sont si beaux, parfois drôles, souvent émouvants. Et Robin, cet être différent, qui à la faveur de ce traitement miraculeux, va devenir si sage, vivant dans l'instant, observateur impénitent du monde qui l'entoure, sensible à la beauté des choses. J'ai eu envie de le protéger, ce petit prince magnifique.

Et j'ai fini ce roman les larmes aux yeux, bouleversée, sidérée.
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