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Critique de colimasson


A l'ouverture, le programme ne semblait pas trop dégueulasse. Pour être honnête, je le trouvais même très pertinent : « L'entrelacement des vies aux mots précaires et impérieux qui nous relient les uns aux autres, c'est cela que rencontre, que déplie, que remue la psychanalyse. »


Mais le programme n'a pas tenu ses promesses. Psychanalyse excentrée substitue peu à peu les « autres » à certains champs limités de la créativité : danse, théâtre et autres fariboles, ce qui exclut déjà un certain nombre d'êtres humains (car tous n'ont pas les moyens ou la force de se lancer là-dedans). de plus, le programme n’a rien de révolutionnaire en soi si l'on se souvient que Freud faisait déjà causer la psychanalyse avec la littérature ou la sculpture. Nous assistons donc plutôt à une réactualisation de cette démarche, voire à une parodie. La psychanalyse ne sortira jamais vraiment de ses propres limites, sauf pour loucher vers la philosophie dont Sabine Prokhoris aime répéter qu'elle est issue. La psychanalyse n'est venue se rajouter à ses bagages qu'à la suite, comme un fardeau plutôt lourd à porter qu'autre chose. C'est ce qu'on imagine en tout cas puisque le résultat de ce mélange n'est pas fameux. On se retrouve avec un traité indigeste qui ne se laissera pas boulotter tranquillement par tous les estomacs. La mauvaise littérature rend le sens fuyant et Sabine Prokhoris donne l'impression qu'elle a écrit pour son kif personnel et pour se faire mousser auprès de ses copains, éminents lecteurs de Lacan et Foucault. Tant pis pour les « autres », dont on parlait pourtant dans l'introduction, et qui ne seront sans doute pas nombreux à comprendre où l'auteure souhaitait en venir. Il aurait peut-être été préférable qu'elle laisse tomber les boursouflures pour réaliser honnêtement le programme de transmission qu'elle faisait miroiter dans son titre.


« du coup, dès lors qu'une réponse nostalgique du pouvoir tyrannique et impuissant de l'hypnotiseur est fournie, sous une forme ou sous une autre, la parole gèlera derechef, dans l'oubli obturant de sa fluidité vivante. »


Et hop, un autre petit morceau de poésie de comptoir :


« Se déprendre, mais pour cela, se laisser prendre : s'éprendre, et se méprendre. »


Et nous n'avons pas encore atteint le pire : il faudra attendre pour cela que Sabine Prokhoris gonfle son jabot à l'annonce du lynchage de ce qu'elle imagine encore être le plus gros tabou de notre époque : la question sexuelle dans l'emprise du genre. L'entreprise serait louable si on suivait la démarche soutenue par les propos de Mary Douglas : « En qualifiant un phénomène de dangereux, on le dérobe à la discussion. On atteint par là même un plus haut degré de conformisme » ; mais à voir le danger partout, on en affadit les limites, et on finit par ne plus rien voir.


Sabine Prokhoris a bien réalisé son boulot de psychanalyse excentrée pour elle-même et pour ses copains, fans de Lacan et de philosophie élitiste. Pour ma part, j'en serais presque venue à répudier la psychanalyse et la philosophie si je ne connaissais pas heureusement des auteurs moins pompeux et suffisamment humbles pour établir la communication.
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