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Critique de oiseaulire


"Le temps retrouvé" est le testament littéraire de Marcel PROUST. Il y dévoile comment se sont révélées à lui, en plusieurs illuminations successives, à la fois la nécessité de son oeuvre et sa substance.

La création littéraire est l'alchimie qui transforme la vie vécue, souvent ressentie comme fade et ennuyeuse, en conscience de ce qu'elle a eu d'unique, pour la seule raison que nous avons été seul à la vivre comme nous l'avons vécue de l'emplacement unique qui est le nôtre.

À travers les déclics de la mémoire et les images qu'elle engendre, s'aperçoivent toutes les strates des souvenirs superposés qui mènent au coeur du mystère de la permanence de l'être et de l'éternité de l'instant.

Cet immense travail sur les relations de la vie, du temps et de l'espace, cette véritable ascèse spirituelle a pour finalité à la fois de repousser la mort et d'y préparer.

La majeure partie de ce dernier livre est constitué de réflexions majeures sur l'art, la philosophie, la création, la mémoire. Des phrases entières, des paragraphes entiers ont fondé la sensibilité contemporaine et se détachent comme des phares devant une côte océanique.

Tels que :

"Cette découverte que l'art pouvait nous faire faire, n'était-elle pas, au fond, celle de ce qui devrait nous être le plus précieux, et qui nous reste d'habitude à jamais inconnu, notre vraie vie, la réalité telle que nous l'avons sentie et qui diffère tellement de ce que nous croyons, que nous sommes emplis d'un tel bonheur quand un hasard nous apporte le souvenir véritable ?"

"Cet écrivain, qui d'ailleurs pour chaque caractère en ferait apparaître les faces opposées pour montrer son volume, devrait préparer son livre minutieusement, avec de perpétuels regroupements de forces, comme une offensive, le supporter comme une fatigue, l'accepter comme une règle, le construire comme une église, le suivre comme un régime, le vaincre comme un obstacle, le conquérir comme une amitié, le suralimenter comme un enfant, le créer comme un monde sans laisser de côté ces mystères qui n'ont probablement d'explications que dans d'autres mondes et dont le pressentiment est ce qui nous émeut le plus dans la vie et dans l'art."

"Chaque lecteur est quand il lit le propre lecteur de soi-même."

"Avoir un corps, c'est la grande menace pour l'esprit (...) le corps enferme l'esprit dans une forteresse ; bientôt la forteresse est assiégée de toute part et il faut à la fin que l'esprit se rende."

"Je bâtirai mon livre, je n'ose pas dire ambitieusement comme une cathédrale, mais tout simplement comme une robe."

"Combien de cathédrales restent inachevées".

"Je pourrais, à la rigueur, dans la transcription plus exacte que je m'efforcerais de donner, ne pas changer la place des sons, m'abstenir de les détacher de leurs causes, à côté de laquelle l'intelligence les situe après coup, bien que faire chanter doucement la pluie au milieu de la chambre et tomber en déluge dans la cour l'ébullition de notre tisane ne dût pas être en somme plus déconcertant que ce qu'ont fait si souvent les peintres quand ils peignent très près ou très loin de nous selon les lois de la perspective, l'intensité des couleurs et la première illusion du regard nous les font apparaître, une voile ou un pic que le raisonnement déplacera ensuite de distances quelquefois énormes."

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