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Critique de fbalestas


Le recueil « Un si joli petit livre » s’ouvre sur une nouvelle succulente : Suzanne prépare un repas de famille, dont la recette est issue de « La véritable Cuisine de famille de Tante Nanette ». Elle met beaucoup de soin à préparer son pot-au-feu.
« Pour conférer au bouillon une belle couleur d’un brun doré, ce qui est fort agréable à l’œil, faites griller au four deux gros oignons. A défaut, vous pouvez utiliser du colorant qui se vend en bouteille chez tous les épiciers. »
Suzanne vient de faire paraître un recueil de nouvelles, mais ce n’est pas encore le grand succès attendu. Elle pousse le plaisir masochiste jusqu’à aller voir chez les libraires si son nom leur dit quelque chose … et s’aperçoit que non.
C’est long la préparation d’un pot-au-feu. Encore plus long le processus d’écriture.
« Cinq heures pour un pot-au-feu, deux ans pour un mince petit livre. Le premier sera consommé en vingt minutes. Le second peut l’être en une heure. Quant à la trace.. »

Claude Pujade Renaud file la métaphore entre cuisine et écriture.
La famille n’est pas forcément le meilleur soutien pour un écrivain. Seule la grand-tante Alphonsine de 97 ans ou Pierre le neveu étudiant en Amérique ont compris que ces nouvelles parlent de la famille. Le reste de la parentèle n’apprécie pas trop qu’on mette à nu les petites vilenies quotidiennes …
A défaut d’apprécier son écriture, les invités vont apprécier la table. Dommage que la nièce Corinne ne soit pas des hôtes.
Sa mère Edith rend à Suzanne l’exemplaire qu’elle avait dédicacé à Corinne. Sous prétexte qu’il n’est « pas de son âge ». Mais peut-être bien plutôt parce qu’il révèle des choses qu’on ne devrait pas dire en famille.
La chute est à l’image de cette nouvelle très réussie : où l’on voit qu’un livre dédicacé, à défaut d’être lu, peut très bien servir de colorant à un pot-au-feu au goût inimitable …

Que ce soient les relations entre fille et mère (« le jardin d’enfance » où il est question de fille-mère) ou les histoires placées sous le signe du double (« les terrasses » où Claire est partagée entre deux hommes), les secrets de famille de province (« Une visite ») et la solitude avec une nièce qui découvre ce que c’est qu’être femme «(« L’annonce »), le regard de l’homme sur le corps féminin (« Dans la glace ») ou le regard de femmes entre elles dans le cadre d’un sauna (« Tendres tropiques ») , Claude Pujade Renaud dévide son fil avec talent et subtilité. Ses thèmes de prédilection sont le rapport à la nature (le paysage, le temps qu’il fait …), l’attention aux petites choses quotidiennes, qu’elle entrelace toujours avec les relations inter personnelles toujours vues de façon très subtile chez cette auteure.

Claude Pujade Renaud est une grande nouvelliste (genre sous-estimé en France mais beaucoup plus développé dans les pays anglo-saxons).

Elle sait comme peu d’autres décrire les relations intimes familiales : frères et sœurs, mère et fille, lignées de femmes, à l’image de la dernière nouvelle de ce recueil,« D’outre-mère », très réussie elle aussi. Une écriture dont on ne se lasse pas.

Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
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