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Critique de klakmuf


Je n'ai pas aimé cette histoire et pourtant il s'agit très certainement d'un grand roman, devenu un classique du XXe siècle.

Il y a déjà d'excellents avis en ligne sur l'importance de ce livre et je ne m'étendrai donc pas sur les réelles qualités du livre. D'abord, l'incipit est accrocheur : « Je vais encourir bien des reproches. Mais qu'y puis-je ? ». Ensuite, l'écriture est empreinte d'un beau style et les ressorts psychologiques sont présents, j'en conviens. Enfin, le dénouement n'apparait qu'à la toute fin du livre, ce qui est une qualité, surtout pour une histoire racontée en forme de récit rétrospectif.

Mais ce personnage narrateur est hautement antipathique, je n'ai ressenti aucune empathie personnelle pour ce jeune François de 16 ans qui séduit la jeune Marthe de deux ans son ainée, promise puis très vite mariée à Jacques, un soldat parti à la guerre de 14. L'amour du séducteur en herbe devient très vite calculateur, plus que sincère et passionné. Derrière chacun de ses transports pour la jeune femme se dessine un froid calcul pour assoir son emprise sur elle et mettre hors jeu son rival légitime et absent. Marthe est aussi mal décrite et le lecteur n'en garde qu'une idée imprécise, celle d'une jeune femme un peu sotte et manipulable, qui s'aperçoit trop tard qu'elle est le jouet des sombres desseins de son amant mais qui continue à l'aimer et à le préférer à son époux. Elle avouera préférer être malheureuse avec lui plutôt qu'heureuse avec l'autre. Comme si l'on pouvait être heureux avec celui que l'on n'aime pas (plus ?).

C'est le roman psychologique par excellence, où l'ancrage des personnages dans un contexte naturel et social est minimaliste. Primauté absolue aux sentiments, à l'analyse, à l'introspection, aux calculs. François le narrateur joue une sorte d'apprenti-sorcier du sentiment amoureux. Il avoue ses méfaits et ses menées, sans le moindre remords, et proclame régulièrement son anticonformisme, une sorte de marque de fabrique chez lui. Il apparait comme une hyperbole de l'idiosyncrasie. Il est d'ailleurs encouragé par un père très compréhensif et « hyper cool » pour l'époque, qui lui laisse « la bride sur le cou ». Une complicité père-fils très inattendue en ce début de XXe siècle et l'on se demande si l'auteur lui-même a eu un père aussi « moderne », puisque cette fiction est directement inspirée de l'histoire d'amour de Raymond Radiguet avec une certaine Alice.

Je mets trois étoiles donc car deux seraient vraiment injuste : il y a ici une très belle plume et beaucoup de profondeur dans l'écriture. Mais je n'ai pas trouvé de grandeur ni de beauté dans cette histoire, seulement beaucoup de vérité, de lâcheté humaine et de cynisme dans les commentaires d'un narrateur adolescent qui s'exprime avec plus de jugeote que tous les adultes qui l'entourent. Un roman fort, c'est vrai, mais fort déplaisant aussi.

Je vois bien, enfin, qu'avec cet avis critique aux accents de billet d'humeur, je vais encourir moi aussi bien des reproches, mais qu'y puis-je ?
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