AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Pois0n


Il y a des livres dont il est facile de parler : ceux qu'on a bien aimé, ceux dont les qualités sont évidentes même si on a pas accroché plus que ça, à l'inverse ceux qu'on a pas aimé ou les très rares tout simplement mauvais. Pour tous ceux-là, pour le meilleur comme pour le pire, les mots coulent tout seuls, fluides, parce qu'on sait quoi dire dessus.
Et puis il y a les autres, tous ceux qui se situent « dans l'entre-deux ». Ceux qui ne sont pas franchement transcendants mais sans être mauvais non plus ; ceux où défauts et qualités se côtoient ; ceux, enfin, à côté desquels on passe complètement et qu'on oublie sitôt refermés... bref, tous ceux dont on ne sait pas trop quoi penser, et pour lesquels on se creuse les méninges à essayer d'expliquer d'où vient ce ressenti mitigé.

Vous l'aurez compris, Noces d'éternité appartient à la seconde catégorie.

Autant le dire tout de suite, Noces d'éternité ne peut pas être qualifié de mauvais livre. Maladroit, peut-être, mais avec de bonnes idées, et qui se lit tout de même plutôt bien, surtout au début. Raison pour laquelle il est impossible de lui mettre une note en dessous de la moyenne.

Ce qui débute sous des airs de roman gothique classique, avec la vieille maison, les phénomènes inexpliqués et des mystères à la pelle, part rapidement dans une direction complètement inattendue. Il est cependant impossible de reprocher à l'autrice de s'être perdue en chemin, au contraire : si la fin déroute complètement, on est indéniablement là où Aude Réco voulait nous emmener dès le départ, il suffit de relire le premier chapitre pour s'en apercevoir. Vous vouliez des histoires de fantômes dans un manoir anglais au 19e siècle ? Lisez autre chose, car ici le surnaturel se fait franchement discret et n'est rien de plus qu'un outil au service du véritable sujet du livre, à savoir la condition de la femme. Noces d'éternité est un récit féministe et assumé, et, de ce côté-là, la réussite est indéniable : dans cette histoire, certaines victimes deviennent bourreaux par la force des choses, et certains bourreaux, des victimes bien méritées...

Ceci dit, si l'intention est là, dans les faits, c'est beaucoup plus bancal et le format court en est, peut-être, en partie responsable. Qu'est-il arrivé au fiancé d'Ellen et pourquoi est-il mort ? Pourquoi est-il impossible de prononcer un certain prénom ? Pourquoi s'en prendre à Ellen qui n'a rien à voir avec le problème initial ? Comment tel personnage, partie de chez elle aussi jeune, a-t-elle acquis les connaissances lui permettant de devenir ce qu'elle est devenue ? Quel est le rapport avec certaines manifestations surnaturelles ? A l'issue du récit, beaucoup trop de mystères demeurent hélas inexpliqués. Plus gênant, le comportement des personnages manque globalement de logique, celui d'Ellen en tête : son empathie à l'égard de quelqu'un qui lui veut du mal au point d'accepter son statut de victime sans broncher n'est absolument pas crédible ! D'un autre côté, un courant d'air inexpliqué la terrifie, mais taper la causette à un fantôme ne lui pose aucun problème ? Son père, en mode girouette, vaut à peine mieux, et le souci ne fait que s'aggraver sur la fin. Pour l'un comme pour l'autre, on a un sentiment d'exagération, presque de caricature, à des lieues de l'ambiance qui se veut plutôt dramatique, vu les secrets enfouis qui ressurgissent. Bilan, on est complètement détaché des personnages et on se moque un peu de ce qui peut bien leur arriver...

Côté narration, il n'y a pas grand-chose à redire, c'est fluide et bien écrit. Par contre, en dehors des dialogues, le style, résolument moderne, nuit parfois à l'immersion et l'on finit par oublier avoir affaire à un récit historique.

Enfin, il reste beaucoup trop de coquilles pour un texte aussi court et censé avoir été relu et corrigé par pas moins de trois personnes !

Toutes ces petites choses, mises bout à bout, eh bien... malheureusement, ça fait beaucoup. L'histoire aurait sans doute gagné à être plus développée, les personnages approfondis, certaines incohérences lissées... mais en l'état, si l'autrice ne mentionnait pas dans sa postface avoir longuement travaillé ce texte, on croirait presque avoir affaire à une première version.

J'aurais aimé accrocher davantage, vraiment, et c'est sans doute pourquoi il a été si difficile de rédiger cette critique, mais je me dois d'être honnête : Noces d'éternité et moi, ça ne l'a pas fait.
Commenter  J’apprécie          90



Ont apprécié cette critique (9)voir plus




{* *}