En visite sur le terrain, le préfet assure ses agents qu'ils seront couverts
par la légitime défense en toutes circonstances, y compris lorsqu'ils tuent.
Le 17 octobre 1961 est enfin là plus terrible répression policière d'une manifestation pacifique dans l'histoire moderne de notre République. Les consignes des organisateurs étaient strictes, au point de se traduire par des fouilles préalables des manifestants : pas de violences, pas d'armes, pas même de simples canifs. La violence qui s'est abattue sur les manifestants, parfois même avant qu'ils ne se constituent en cortèges, dès leur interpellation sur la base d'un tri ethnique à la sortie du métro fut d'une férocité inimaginable. Il n'y eut pas seulement des dizaines de disparus - frappés à mort, jetés à la Seine, tués par balle - mais aussi onze mille arrestations, et une foultitude d'hommes parqués plusieurs jours durant, sans aucune assistance, dans l'enceinte du Palais des sports de la porte de Versailles.
Edwy Plenel P10.
Aucune institution de la République ne témoigne sans doute mieux dans ses pratiques d’une colonialité héritée que la Police nationale. (…) Créée en 1941 par le régime de Vichy comme instrument centralisé de répression raciale et politique, elle est, depuis lors, restée inchangée dans son organisation.
Sorti inchangé de sa naphtaline et réaffirmé avec un culot hors du commun par Maurice Papon, confirmé avec l'autorité par des témoins au-dessus de tout soupçon, le mensonge d'État de 1961 peut toujours, trente-six ans plus tard, se faire passer pour la vérité.
Pogrom : le mot jusqu'ici, ne se traduisait pas en français. Par la grâce du préfet Papon, cette lacune est comblée. P89
Jean-Luc Einaudi a dévoué sa vie à l'exigence de cette parole salvatrice qui, loin de diviser et fracturer, nous apaiserait et nous libérerait, à la fois consolatrice et réconcialiatrice.
Aucune violence sérieuse de leur part ne put être signalée et aucun policier ne fut sérieusement blessé. L'usage d'un vocabulaire fleurant bon le racisme anti-arabe et l’islamophobie et celui, répété, du mot “troupe“ pour désigner les manifestants tiennent lieu de démonstration de la dangerosité de la manifestation.
Le 17 octobre 1961 est une date française aussi bien qu'algerienne.
Pour l'heure, un seul lieu de mémoire porte officiellement témoignage dans notre Hexagone des crimes commis par la France pendant la guerre d'Algérie : c'est le cénotaphe de Maurice Audin, au cimetière parisien du Père-Lachaise, tombe sans corps du jeune mathématicien communiste algérois mort sous la torture en 1957.
La date du 17 octobre 1961 fait partie de notre histoire, et nous devons la regarder en face.