Mauvaise pente

Il s'était baissé dans le jardin pour ramasser un caillou sur la pelouse et il avait basculé, s'affalant la tête la première, le derrière en l'air, comme un petit enfant s'endort dans son berceau.

" - Quand j'entends le mot "trains", je vois toujours ces pauvres types couverts de poussière noire occupés à enfourner du charbon dans le machin ou de siffler. Mais je sais bien que maintenant c'est du diesel et le fameux "homme mort". Hein, Myles, c'est comme ça qu'on l'appelle, l'homme mort ? C'est un truc que tient le conducteur et, s'il fait une crise cardiaque ou quelque chose de ce genre et meurt sur le coup, il lâche la manette, alors le train s'arrête. Vous saviez ça ? Sauf que, d'après Myles, quelquefois ils la bloquent avec un bout de bois ou un journal ou je ne sais quoi, pour... enfin, je sais pas trop bien pour quoi faire - elle rit. L'homme mort... Quelle drôle d'expression ! "

" - Tous les dimanches sans exception, avait précisé l'homme d'Eglise, à la messe de neuf heures, avec les enfants. C'était un femme pieuse, votre épouse. Une femme pieuse. C'est drôle, j'ai toujours pensé qu'elle était veuve.
- Tiens donc ? Et pourquoi cela ?
- Parce que vous n'étiez jamais avec elle."

Sa mère dans la pièce à côté. Souvenirs. Il se rappela ce qu'il éprouvait à l'époque où il occupait la chambre voisine de celle de ses parents et se demandant s'ils pouvaient l'entendre, l'estomac noué lorsque son père traversait le couloir, l'angoisse diffuse d'être enfermé à l'intérieur de cet espace réduit et inhospitalier, la sensation du mur froid où il appuyait sa tête, recroquevillé au creux de son lit pour se protéger de la lumière sous la porte.

Mrs. Talbot poussa la porte battante et revint avec une tasse de thé.
- Quand j’entends le mot trains, je vois toujours ces pauvres types couverts de poussière noire occupés à enfourner du charbon dans le machin ou de siffler. Mais je sais bien que maintenant c’est du diesel et le fameux « homme mort ». Hein, Myles, c’est comme ça qu’on l’appelle, l’homme mort ? C’est un truc que tient le conducteur et, s’il fait une crise cardiaque ou quelque chose de e genre et meurt sur le coup, il lâche la manette, alors le train s’arrête. Vous saviez ça ? Sauf que, d’après Myles, quelquefois ils la bloquent avec un bout de bois ou un journal ou je ne sais quoi, pour… enfin, je ne sais pas trop bien pour quoi faire – elle rit. L’homme mort… Quelle drôle d’expression !
Myles rit en écho. Il jeta un coup d’œil à sa montre. En retard, comme d’habitude. Il avala son thé d’un trait mais ne fit pas mine de bouger.
- Voilà votre thé, ma petite dame.
- Merci bien.
- En fait, c’est pas comme ça qu’on devrait l’appeler, dit Myles. Parce que, si le conducteur casse sa pipe, il la lâche, la manette. On devrait l’appeler l’ "homme vivant " et pas l’homme mort, si vous voyez ce que je veux dire.
La femme hocha la tête. Elle avait du mal à garder les yeux ouverts.