Les hommes se tournent vers Dieu quand il ne leur reste plus rien. Les hommes perdus en mer. Ils jettent une ligne dans la nuit et ils se convainquent que l'océan sans visage qui les cerne de toutes parts s'appelle Dieu et Sa miséricorde et que le misérable plouf que fait leur ligne en heurtant la surface est le bruit que fait Dieu lorsqu'il repêche leurs prières et tourne vers eux Sa face de bonté.
Elle se souvint de l’odeur de son mari quand il se mettait au lit, l’odeur épaisse et douceâtre de son corps, comme celle d’un chiffon trempé dans l’eau d’un vase de fleurs fanées.
Les vides. On est tous pleins de vides. Ce sont les vides qui prennent le plus de place dans nos existences, madame Wilson.
On ne voit pas grand monde par ici le mardi, je ne sais pas trop pourquoi. C'est le jour le plus calme de la semaine. Il a un peu de mal à exister, ce pauvre mardi. Mercredi, c'est déjà le milieu de la semaine, jeudi on va vers le week-end, vendredi on y est en plein, samedi et dimanche n'en parlons pas, et puis lundi c'est la semaine qui recommence, tout le monde se plaint jusqu'au soir, mais mardi, bon...il se met dans un coin et il attend que ça passe, vous ne trouvez pas ?
Son réveil fut étrange. Elle émergea lentement et les faits lui revinrent en mémoire l'un après l'autre - où elle était ; comment elle était arrivée là ; les événements des jours précédents. (...). Un changement s'était produit en elle. La panique avait disparu. L'anxiété aussi. Une sorte de quiétude avait pris leur place...
De sorte que, voyez-vous, c'est cet espace qui m'est devenu cher. L'espace à côté de moi, le vide. Le manque. Si je le comblais, j'oublierais. Et je ne veux pas oublier. Tout ce qu'il me reste de lui, c'est le vide qu'il a laissé. J'y tiens beaucoup.
Grace lâcha son bras, puis celui de Philip, ressentit ce moment de séparation avec acuité, l'enregistra, le grava dans sa mémoire, le rangea bien à l'abri. Alors, très vite, pour que ça n'ait pas l'air trop grave, elle embrassa Ida en lui murmurant quelque chose, et elle serra Philip dans ses bras pour qu'il se sente moins étranger au monde.
Imaginer que tomber de très haut est une progression. Une chose qui en vaut la peine.
Les réverbères étaient des épingles qui accrochaient bord à bord l’encre du ciel à l’encre de la terre ; la pluie dissimulait les montagnes qui s’élevaient dans le lointain.
Ça fait un gros choc, quand vous perdez quelq'un de tellement proche que vous aviez oublié qu'il était là. C'est seulement quand vous découvrez qu'il y a un espace là où il n'y en avait pas avant que vous vous rendez compte. Ça fait un vide, un frisson, comme un courant d'air. Et vous vous dites : il n'y avait pas quelque chose, là ? C'est à ce moment là que vous comprenez.
De sorte que, voyez vous, c'est cet espace qui m'est devenu cher. L'espace à côté de moi, le vide. Le manque. Si je le comblais, j'oublierais. Et je ne veux pas oublier. Tout ce qu'il me reste de lui, c'est le vide qu'il a laissé. J'y tiens beaucoup.