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Critique de ALDAMO21


Ce roman est magnifique !
Ce roman m'est un gros coup de coeur.
Un roman avec un texte puissant, profond et très percutant.
Un roman presque animal qui oscille entre le chasseur et la proie, entre le l'amour et la haine, entre la fascination et le dégout.
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Il est assez rare pour moi de lire une aussi belle écriture que celle de Blandine Rinkel.
Parce que l'auteure dégage une force, une sincérité, une authenticité, parce qu'elle m'a semblé maitriser en grande harmonie son sujet. Parce qu'elle marchait sur un fil, comme une gracieuse équilibriste, entre douceur et cruauté.
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C'est un sujet difficile qu'aborde l'auteure, avec une grande sensibilité parfois à fleur de peau.
Celui de l'héritage familial psychologique, de son poids et de ses traumatismes générationnels qu'il crée dans un noyau familial.


Blandine Rinkel, qui écrit à la première personne du singulier, est Lou. Elle est cette petite fille. Elle est cette jeune fille. Elle sera aussi cette femme qui nous racontera ses sentiments paradoxaux qu'elle a vécu pendant toutes ses années d'adolescente.
Lou est cette petite fille qui voue une admiration démesurée et un amour immense pour son papa Gérard.
Mais à l'âge de comprendre et de raisonner en petite fille, Lou sera très vite traversée par ses sensations diverses et contraires devant la personnalité déroutante, et les attitudes parfois irrationnelles de son papa.
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Mais qui est ce père, qui se conduit en loup toujours affamé, qui veut sans cesse capter l'attention de son auditoire, mais surtout avoir l'exclusivité de l'affection que lui porte sa fille ?
Blandine Rinkel nous brosse le portrait magistral d'un père magnifiquement ambigu. Un père meurtri par la vie et prisonnier de son passé.
Un homme qui cache de grandes blessures derrière son assurance, sa gouaille, son talent pour faire rire son entourage avec des histoires aussi mensongères que fantastiques.

Un père qui ne veut pas montrer ses faiblesses qu'il considère comme des tares. Un père toujours borderline. Si bien qu'à chaque page du roman, je craignais que ce papa déraille encore plus, qu'il puisse encore plus basculer dans ses névroses.
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Alors comment une petite fille dans ces conditions, peut-elle se construire ?
Comment construire le socle de son être, si au-delà de l'émerveillement pour son papa, Lou a parfois des sentiments de doutes, de craintes et de peur qui la traversent.
Comment une petite fille puisse ériger les premières fondations de sa vie sur la confiance et ses vérités ? Alors qu'elle perçoit son papa en père mythomane, un père silencieux et secret lorsqu'il tait trop de choses surtout sur sa vie d'avant.
Comment une petite fille puisse ne pas s'identifier au père ?
A sa douceur mais aussi à sa violence, celle de ses mots brutaux qu'il crie parfois à son encontre.
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Lou va alors s'interroger sur ses ressentis nouveaux de peur, d'humiliation et parfois de colère qui remplissent et troublent son coeur débordant d'amour.
L'image comme une icône religieuse de ce père tant adulé, va commencer à se craqueler et se ternir.
Les rapports « clairs-obscurs » qu'elle entretenait avec son papa, vont se tendre pour devenir de plus de plus conflictuels.


La lettre écrite par Lou à son père, qui termine ce beau roman, m'a fait mouiller les yeux.
J'ai ressenti combien les blessures de Lou alors femme, étaient vives. Et combien elles allaient pour longtemps balafrer l'âme de Lou.
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Merci Blandine Rinkel pour m'avoir autant touché et fait vibrer en parlant de cet héritage filial que chacune et chacun de nous reçoit dès le plus jeune âge.
Car dans le processus naturel des choses, nos parents ne nous transmettent pas seulement une éducation, une morale, un héritage génétique.
Il y a un autre « bagage », celui d'une mémoire consciente ou inconsciente sur des évènements passés sous silence, des secrets de famille.
Une mémoire troublante et perturbatrice qui se transmet de génération en génération et constituent le socle et les fondations de ce que nous sommes.


Il y a en chacun de nous des vieilles morsures et leurs cris de douleurs, laissées par nos pères et les pères de nos pères.
Et c'est à chacun de nous en libérer.


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