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Critique de Bibliozonard


Contexte : La guerre froide : anglais : Cold War, russe : холодная война, khalodnaïa vaïna. La période de tensions et de confrontations idéologiques et politiques telle que le capitalisme VS le communisme. Entre les deux superpuissances que furent les États-Unis et l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS).
Supplément offensif : L'invasion soviétique en Afghanistan.

Leo Demidov, un ex-agent du MGB (Futur KGB) ne fera jamais le deuil de sa femme feu Raïssa. Il n'avait plus le droit de sortir du pays et n'était pas là quand elle fut assassinée après avoir été accusée du meurtre d'un chanteur noir communiste engagé, le jour d'un concert symbolique en 1965 à Manhattan. C'était le jour d'un meeting au siège des Nations Unies qui avait pour but de maintenir une paix durable entre les États-Unis et l'Union soviétique. Un concert organisé par les deux nations dont madame Demidov et ses deux filles participaient avec les chorales d'étudiants américains et russes. Une image d'union, de respect, d'espoir. Un cauchemar pour Leo commence. le désir maladif de retrouver le véritable meurtrier. Car pour lui, c'est l'évidence même, il y a anguille sous roche. Après une sanction disciplinaire pour avoir tenté de joindre l'Amérique, il erra plusieurs années en Afghanistan au service du communisme. L'opium, la guerre, le climat hostile dans lequel il vivait le rendit asocial, nu de sentiment, désillusionné, errant. Un homme vide sans buts à part ceux d'obéir machinalement à la transe de ses nuits opiacées et à l'observation de ses journées poussiéreuses. Que sont devenues ses filles restées au pays qu'il n'a plus vues depuis près d'une dizaine d'années ? Comment réagir alors qu'il est sous pression coincé dans une invasion armée injustifiée qu'il est censé favoriser ? Qui a tué sa femme dans le pays capitaliste ? Croire en quoi, en qui ? Leo, bloqué en Afghanistan, voit ses chances de revoir sa famille et venger l'élue de son coeur s'amenuiser à petit feu.

La boîte à outil de la propagande, qu'elle vienne du côté rouge Lénine ou du flag étoilé McCarthy. Peur importe sous qui de toute manière. Il s'agit ici de la tension qui s'incruste dans les esprits suite à un jeu d'espionnage, de manipulation, de folie outrancière qui dura un peu plus de 40 ans. L'un considérant l'autre comme extrême. La guerre froide, un tragique délire. le décor planté, l'ambiance paranoïaque, l'intensité de la rigidité des esprits, l'auscultation et l'occultation des idéaux, les actions punitives, le nettoyage, les interrogatoires… Tout est là pour animer la carte. La haine étouffée, l'implosion de l'être humain impuissant devant le pouvoir indomptable, les victimes définies comme des dommages collatéraux pour une cause plus grande.
Le montage est très bien agencé de sorte que la lecture file. Chapitres brefs accumulés, une ambiance page turner assurée. Pas de long épanchement, de débat obèse et écoeurant d'un point de vue des stratégies politiques ou des interactions complexes entre des systèmes autoritaires et arbitraires. C'est l'avantage du roman. Tout est bien morcelé pour susciter la curiosité. Les personnages ont leurs opposés, il y a de l'émotion sans sentimentalisme, de la rage sans en faire dans le scénario du Rambo débilitant, de la justesse des propos, de la logique dans l'histoire sans ficelle aussi grosse qu'une amarre. Une dénonciation d'une souffrance, d'une injustice. Un coup d'oeil efficace.
Le bémol. le titre donne bien, mais peut tromper le lecteur. Il est accrocheur, mais loin d'être central dans l'aventure. Une manière de manipuler celui qui pince les pages pour brouiller une piste ? L'intrigue n'est pas révolutionnaire : un assassinat peu de temps après celui de Malcom X et pas loin de celui de JFK, à une longueur de mai 1968, une vengeance interdite sous des régimes fumeux, une chute moins explosive. Un rassemblement de classique en somme...
Malgré tout cela, ce n'est pas grave. L'évolution du personnage principal, le plantage des éléments de l'intrigue sont placés de sorte qu'on ne lâche pas le bouquin jusqu'à la fin. Moi qui ne suis pas un assidu des romans d'espionnage, j'ai passé un très bon moment. Une lecture décontractée, sans m'exclamer debout sur mon fauteuil, le livre brandit vers le plafond : Arnaque et foutaise ! OU La larme à l'oeil : Merci ! Hallucinant ! Fabuleux. Non, rien de tel. C'était rapide et précis sans vouloir surprendre, c'est passé vite.
Pour moi, la réussite tient dans le fait qu'après coup je suis resté interloqué de manière peu fraîche, peu profonde, mais spontanée : Merde. Combien ont lâché leurs tripes sur le sol où nous nous pavanons ! Grincheux, pour un caprice de consommateur, pour une liberté bafouée parce qu'on nous a insultés, parce que les taxes sont trop élevées, parce qu'on doit partager le territoire et les droits avec des étrangers alors qu'on a ouvert nos frontières, parce qu'il y a trop de pauvres et trop de riches, et trop de tout, parce qu'on a peut-être appuyé sur les détentes des armes que nous finançons pour soulever des révoltes un peu partout dans le monde, en votant mal. Alors, après coup, je me dis que oui, merde. Je suis libre. N'est-ce pas un délice ? Rien que pour ça, je trouve ce livre intéressant. Il est même accessible pour les non férus de complots militaro-politiques.
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