C'était à moi de ne pas me laisser submerger par mes problèmes. Je devais m'efforcer de ne pas devenir un fantôme ou un homme sérieux, qui ressent plus d'affection pour une machine que pour un animal. Je ne devais pas m'accrocher au passé ou au futur, mais vivre l'instant présent, au contraire, et privilégier l'être plutôt que l'avoir. Pour vivre heureux, je devais ouvrir mon cœur.
- Quant aux personnes, ajoutais-je avec conviction, je suis persuadée que nous finissons toujours par rencontrer celles qui nous correspondent. C'est à nous de les reconnaître et de les distinguer des autres.
Les souvenirs nous empêchent de savourer l'instant présent parce que nous aimerions revivre des choses que nous avons vécues dans le passé. Alors que ça n'arrivera jamais. De même que l'eau d'une rivière se renouvelle en permanence, les situations identiques ne se répètent jamais deux fois dans la vie. Et malgré cela,les gens essaient de revivre toujours les mêmes choses, ce qui empêche d'en vivre d'autres, tout aussi agréables, voire plus.
- Il nous arrive de penser que celui qui dénonce est meilleur que celui qui nous fait cadeau d'un rêve. Mais pourquoi ?
Je profitai de la perplexité dans laquelle ma question l'avait plongé pour poursuivre :
- Ne fais pas confiance à ceux qui détruisent tes illusions sous prétexte de te rendre service. Bien souvent, ils n'ont rien à te proposer pour les remplacer.
Il est évident que tes tâches quotidiennes ne suffisaient plus à satisfaire ton âme et que tu ne cultivais pas un art ou un passe-temps qui aurait pu te servir de refuge. Dès lors, ton existence était devenue insipide, et la seule chose qui t'aidait à tenir était la nolstalgie que tu éprouvais pour cet ami absent. Mais dès l'instant où ce soutien s'est effondré, tout le reste a suivi.
- Tu fais comme si tu étais étranger au problème et tu en rejettes la faute sur quelqu'un d'autre. Ce n'est pas la meilleure façon de le résoudre, dis-je calmement..
Parce qu'en fin de compte, tu as perdu la joie de vivre, l'essence même du bonheur..
Mais sache que, même si tu te sens accablé pour l'instant, ce n'est pas la fin du monde. Tu as la volonté de surmonter cette épreuve, ainsi que l'exige ta nature spirituelle et ton instinct animal.
Mais si forte qu'ait été mon envie d'en savoir plus sur ce surprenant garçon, je savais que les confidences viendraient toutes seules et plus vite si je ne cherchais pas à les lui arracher. Il en va des gens comme des huîtres : il n'y a rien à faire sauf attendre patiemment qu'elles s'ouvrent pour nous offrir la perle qu'elles protègent.
La seule façon de changer le monde, c’est de changer nous mêmes (p35)