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Critique de Delphine-Olympe


Les écrivains s'inspirent parfois de leurs glorieux aînés. Lorsqu'ils prennent la plume à leur tour, ils en sont nourris, pétris. Il n'est qu'à choisir n'importe lequel des livres d'Olivier Rolin pour s'en convaincre, dont les textes sont habités de références et d'images littéraires. Cette fois, il s'agit plus que d'une réminiscence. C'est la lecture - ou la relecture - de pages parmi les plus prestigieuses de notre patrimoine qui a présidé à l'écriture de son nouveau roman. Chapitre premier du livre I de la cinquième partie des Misérables : nous sommes en juin 1848, Paris s'embrase une nouvelle fois et Hugo évoque deux figures de ce mouvement insurrectionnel, Emmanuel Barthélémy et Frédéric Cournet, respectivement aux avant-postes des deux principales barricades qui ont été érigées. le passage est bref, mais Hugo précise que le premier tuera le second en duel, à Londres, lorsqu'ils s'y retrouveront tous deux proscrits.

Olivier Rolin a eu envie de connaître l'histoire qui se cache derrière ces quelques lignes. Car, contrairement à Valjean ou à Cosette, ces personnages ne sont pas nés de la fertile imagination de notre grand écrivain national. Ils ont bel et bien existé et recelaient de toute évidence une matière romanesque qui restait à mettre au jour. Ce que Rolin a réalisé avec maestria (évidemment), et surtout sa manière inimitable.

Ne cherchez pas, donc, de récit linéaire. Rolin déambule entre les lieux - Paris et Londres -, les époques - la décennie 1830, juin 1848, les années 1850 et nos jours -, les événements historiques - les différents épisodes révolutionnaires du XIXe siècle, le coup d'Etat du 2 décembre 1851, mais aussi Mai 68 -, et, bien sûr, les réminiscences littéraires - sans même parler de Hugo, omniprésent, Balzac, Sue, Dickens et même Vallès !

Si vous connaissez Rolin - comment imaginer le contraire ! - vous savez qu'il procède par échos. Il emprunte parfois des chemins de traverse, mais ne se perd jamais et revient toujours à son affaire. Il se remémore des anecdotes personnelles, qui viennent donner chair à ce qu'il décrit. Il est un passeur entre passé et présent, entre une réalité qui peut apparaître triviale, voire sordide ou cruelle, ou simplement banale, et la manière dont celle-ci a pu être sublimée par un écrivain qui y apposé ses propres mots. C'est précisément sa perception personnelle et sensible qui donne cohérence à son récit, tout comme son humour teinté d'autodérision l'empêche de sombrer dans la pédanterie, tandis que la richesse de la langue qu'il déploie lui apporte beauté et poésie.

Ce texte est pour moi un cadeau : que l'auteur contemporain que j'admire le plus ait pu écrire sur le siècle qui m'a longtemps passionnée, dans sa dimension tant littéraire qu'historique, je n'aurais osé en rêver. Pour cela il a pour moi une saveur et une dimension particulières et vient directement se hisser aux côtés de L'Invention du monde (est-il besoin que je vous rappelle que ce roman est un chef-d'oeuvre ?). Trente ans après, Olivier Rolin reste au sommet de son art.


Lien : https://delphine-olympe.blog..
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