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Critique de kielosa



Joseph Roth appartient, comme son compatriote et ami Stefan Zweig, tout en haut de la courte liste de mes auteurs préférés. Ce n'est donc nullement une coïncidence si le présent billet constitue le septième consacré à une oeuvre de cet auteur depuis mon adhésion à Babelio en mars 2017, chiffre égalé d'ailleurs uniquement par Zweig.

Je regrette que ce roman inachevé m'a déçu, ou plutôt fait de la peine, probablement parce qu'il est resté inachevé et sûrement à cause des circonstances dans lequel il a été écrit : son dernier ouvrage avant l'exil de l'auteur, en tant que Juif et journaliste critique, le 30 janvier 1933, à l'annonce de la nomination d'Hitler comme chancelier.

Ce roman, qui est resté inédit jusqu'à sa découverte, en 1978, dans des cartons cachés par son éditeur, 39 ans après la mort de Roth à Paris le 27 mai 1939, à l'âge de 44 ans, reflète la situation difficile et périlleuse dans lequel Roth vivait et travaillait.

Ce qui explique sans doute qu'aucun des personnages de ce roman n'est attirant. À commencer par le personnage principal lui-même, Alexandre Perlefter, un triste sire, un individu falot, vaniteux et foncièrement désagréable. Son épouse est une femme effacée, qui vit à l'ombre de son "grand" Alexandre, et leurs quatre enfants, Alfred "Fredy", Karoline, Julie et Margarete, ne risquent pas non plus de gagner un prix de charme.

Pourtant, ce roman de Roth vaut indéniablement la peine d'être lu pour la qualité rarissime de la formulation particulière de ses descriptions de l'atmosphère et des personnages, avec tant de précisions concises et humour caustique.

Ainsi, par exemple, le narrateur du récit, Naphtali Kroj, est né dans une ville qui n'était pas une ville au sens européen du terme et qui "comptait mille cinq cents âmes. Et parmi elles, mille négociants juifs". Rappelons que Joseph Roth est né le 2 septembre 1894 à Brody, à l'époque à l'extrême est de l'Empire austro-hongrois, actuellement en Ukraine à une centaine de kilomètres à l'est de Lviv ou Lvov.

Autres exemples : "Son front abritait des pensées archisimples...", "Fredy... se préparait à faire un mariage bénéfique." Fredy était "enveloppé du charme de ces sphères merveilleuses où l'art se mêle au péché et donne une justification à ce dernier." Ce que Perlefter aimait chez les femmes, "c'était la quantité, le volume et le poids."

Cet ouvrage paru en septembre 2020, comporte 8 relativement brèves nouvelles datant des années 1920, dont certaines ont été traduites pour la toute première fois.
J'ai bien aimé la surprenante nouvelle "La riche demeure d'en face" de 1928 et celle sur le retour du guerrier dans "Humanité malade", non datée.

Il convient de souligner la remarquable traduction par Pierre Deshusses, professeur à l'université de Strasbourg, qui a également écrit un avant-propos des plus instructifs et intéressants sur Joseph Roth et son oeuvre littéraire.
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