je fais la page
comme d’autres la rue
j’écris par évitement
sous des toits éphémères
ma feuille fuit
en ruisseaux asséchés
le soleil entre par le sang
j’écris de l’intérieur
quand tout m’obstrue
pour naître de ce temps
lire
comme si on m’avait blessé
comme si le mot me frappait
ces poèmes pour toute conscience
agitant les ailes de l’âme
encore
les désirs veillent tard
les ailes de l’orthographe
au corps des mots légers
pèsent lourdes
je souscris
à une écriture affolante
en mon cœur déraisonné
les mots s’embrassent
sur la table
de leur débordement
mille plumes brouillent
seule
persiste
la page nue
ni le temps ni les champs
ni les chants ni l’espace
ne s’amoncellent
au lieu d’être
je suis verbe
par ce que je crois
désormais les bruits
en mon lieu public
dire
échelonner les paroles
mes voies sauvages
je suis le non-texte tu
je me livre au verbe
tuant toute sémantique absolue
je m’absente du sens
seul le verbe s’épuise
seul, j’écris
sous la page désertique
lieu de ma mémoire
l’immuable troupeau de flammes
sous les mots s’avance
la lumière se regroupe
le feu conscient attaque
mille pages incandescentes
plaies abandonnées
au feu d’aube
c’est l’incontournable secours
qui dirige le texte
injustices flamboyantes
mille pages anarchiques
au repos de l’aube sur l’herbe
trace l’informe beauté du manque
le poème brûle
sur l’horizon d’une page
une fiction en vue
sur des lignes insupportables
le langage jusqu’aux yeux
j’écris en n’en plus finir
mon très maigre poème
sur l’enclume de chaque mot
forger l’œuvre
écrire
point à la ligne
pour l’unité