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Critique de Marie-Nel


J'ai lu ce roman dans le cadre du Prix des Lecteurs du Livre de Poche, c'est ma deuxième lecture du mois d'août, et c'est à nouveau un roman qui m'a surprise en positif. Je ne pense pas que je serai allée vers lui de moi-même, je ne sais pas trop pourquoi d'ailleurs. le résumé est pourtant intéressant, c'est surtout que je ne l'ai pas tellement vu au moment de sa sortie en grand format. Et pourtant, son auteure est elle aussi chroniqueuse d'un blog littéraire, et le comble, c'est que je la suis sur Instagram, comme quoi on loupe souvent des infos…
J'étais donc curieuse de découvrir une nouvelle auteure et son premier roman. J'aime beaucoup lire des premiers romans, surtout avec un beau parcours.
Je ne vais pas trop revenir sur l'histoire en elle-même pour ne pas vous en dévoiler de trop et vous laisser la surprise au moment de la lecture. Il va s'agir de l'histoire de Brune. Elle raconte son histoire d'amitié avec Brigitte. Ce sont deux amies de lycée, elles se sont connues en première, ont passé le bac ensemble, sont allées dans la même université, sauf que Brune fait des études en médecine pour devenir dentiste et Brigitte comme sage-femme. Au moment où commence le roman, Brune est enceinte de son deuxième enfant, elle ne parle plus à Brigitte, elles se sont brouillées depuis des années, mais Brune pense toujours à Brigitte, elle rêve d'elle, et dans ses rêves, Brigitte est aussi enceinte. Brune arrive à avoir de ses nouvelles par sa première fille, car son ex mari est resté ami avec Brigitte. Brune va ainsi retracer toute leur histoire, de leur rencontre à leur séparation. On va les suivre dans leurs études, leurs vies privées avec tout ce que peut connaître quand on est jeune fille, la transformation des corps, les premiers émois amoureux, la première fois avec un garçon, les premiers amours. La jeunesse est remplie de premières fois et de nouvelles expériences et Brigitte et Brune les vivent ensemble, avec les joies qu'elles peuvent vivre et les brouilles qu'elles peuvent avoir.

L'originalité de ce roman est dans la forme de récit et surtout dans le choix narratif choisi par l'auteure. Je crois que c'est le premier roman que je lis écrit ainsi. En effet, il est écrit à la fois à la première personne du singulier et à la fois à la seconde. C'est-à-dire que Brune parle à Brigitte, elle lui raconte tout, ce qu'elle ressent, ce qu'elle vit et ce qu'elles ont vécu. On assiste ainsi à un dialogue ou comme si Brune écrivait à Brigitte pour lui parler. Cette façon de raconter crée un climat très intimiste à la lecture, car, en fait, c'est comme si le personnage s'adressait directement au lecteur en le tutoyant, en le prenant à partie. le lecteur se retrouve à la place de Brigitte, il endosse le second rôle principal, ce qui n'est pas rien non plus. J'ai vraiment beaucoup aimé cette originalité, me retrouver à la place de Brigitte, sans pouvoir répondre à Brune. Et en même temps, je me suis aussi sentie très proche de Brune, de ce qu'elle pouvait ressentir, ce « je » qu'elle emploie m'a permis de rentrer dans sa tête et de savoir tout ce qu'elle pensait. J'aime beaucoup ce procédé qui me permet de vivre au plus près des personnages, de m'imbiber de leur façon d'être et vivre le temps de quelques pages dans la peau de quelqu'un d'autre. Bon, l'inconvénient, c'est que j'avais aussi parfois envie de râler après Brune quand je n'étais pas d'accord avec elle, et c'est arrivé aussi.

L'attachement aux personnages a donc été entier, même si j'ai ressenti plus d'empathie pour Brune que pour Brigitte, et ce du fait qu'elle est absente du livre. Et c'est là aussi la force de cette originalité, c'est que Brigitte est un personnage fort présent mais pas physiquement là. J'aurais peut-être aimé avoir une réponse justement de Brigitte, ou savoir ce qu'elle, elle pensait de la situation, savoir comment elle, elle a vécu les mêmes événements que Brune. Mais, bon, avoir l'opinion de Brigitte aurait cassé le dialogue de Brune, et ça aurait été dommage. Mais je cherche vraiment la petite bête là…
Le style, quant à lui, est très bon, le vocabulaire correspond à une jeune femme de trente ans, il est parfois vif, cru, violent, selon les situations qu'elle vit. Mais pareil, j'ai trouvé que cela donnait beaucoup d'authenticité et d'épaisseur au personnage. Brune est plus vraie que nature et j'ai très bien réussi à me l'imaginer et à la regarder évoluer. Vu l'âge et le caractère de chacune, il va être question de bar, de boites, de soirées qui n'en finissent plus, alcoolisées à ne plus voir le jour le lendemain. Les bancs de l'université de médecine sont aussi présents, avec leurs rites de passage, leurs fonctionnements. Agathe Ruga a elle aussi suivi des études de médecine puisqu'elle était dentiste, et on ressent bien sa propre expérience dans tout ce que Brune et les autres personnages vivent. Une nouvelle fois, cela apporte beaucoup d'authenticité au récit.
Les pages se tournaient toutes seules, j'avais tellement envie de savoir ce qui allait arriver aux jeunes femmes que j'essayais d'aller plus vite dans ma lecture. En fait, je voulais savoir la cause de la brouille entre les deux, ce qui avait causé ce silence entre ces deux personnes qui pourtant s'entendaient bien et étaient inséparables. Par contre, j'ai été un peu déçue justement par le dénouement, mais je crois que ça vient de moi, j'en attendais beaucoup plus, d'autres explications plus détaillées. Mais cela ne m'a pas du tout empêchée d'apprécier ce livre.
Cette histoire est porteuse de beaucoup de messages sur la vie, sur l'amitié bien sûr et principalement, ce qu'on peut faire ou ne pas faire en son nom. L'amour est lui aussi représenté, les personnages masculins ne sont pas inexistants et remplissent leurs rôles, Valéry, Samuel, Marceau font partie des vies des jeunes femmes et sont représentatifs aussi de leurs générations. La musique tient un rôle important dans ce livre, et surtout avec les chansons de France Gall dont certaines phrases sont citées en-tête de partie. Un autre point aussi particulier est que les lieux ne sont pas cités, on ne sait pas dans quelle ville cela se passe, dans une grande avec un salon littéraire, mais de telles villes sont nombreuses en France. Les paysages ne sont pas spécialement décrits, à part les rues, les bars ou les appartements, très peu d'indications sur les lieux. Cela ne m'a pas non plus dérangée, cela fait que l'on peut reporter l'histoire dans des lieux que nous connaissons.
Ce récit aurait pu être celui de tout le monde. On a tous une amie ou un ami qu'on n'a pas vu depuis longtemps et pourtant qui nous connait si bien, avec qui on a fait les quatre cents coups, et que la vie et tout ce qui s'y passe a éloigné de notre chemin. C'est le cas en tout cas pour moi, et je pense très souvent à elle, les kilomètres se sont ajoutés, les distances allongées et la routine sépare parfois les personnes qui s'apprécient. J'ai beaucoup pensé à elle en lisant l'histoire de Brune. Je vais d'ailleurs vous laisser avec cette citation de Brune sur l'absence qui me parle énormément :
« L'absence est pire que la mort, rien n'arrête le sentiment d'absence, on est condamné à vivre avec tous ces absents qui demeurent quelque part et sans nous. Et quand bien même ils tenteraient de revenir dans nos vies, leurs réapparitions ne changeraient rien. Ils ont été absents, ils seront toujours absents, ils ont créé un immense vide, impossible à combler. Il n'y a pas d'issue. Les absents sont des trous dans nos coeurs. »

Rien que relire ces quelques lignes me serre à la gorge d'émotion…Pour conclure, je suis contente d'avoir lu ce roman et d'avoir fait la découverte de cette auteure. Je vous le conseille, pour l'originalité de sa narration et pour les tranches de vie de ces jeunes femmes et hommes que nous avons été, et que nos enfants seront. Je vais noter Agathe Ruga dans ma liste d'auteurs à suivre, je suis curieuse de la lire à nouveau pour voir quel thème elle abordera.

Lien : http://marienel-lit.over-blo..
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