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Critique de Yaena


J'ai lu beaucoup de témoignages sur cette période de l'histoire et chaque fois que je tourne la dernière page de l'un d'entre eux je suis intimement convaincue qu'ils sont tous essentiels. Celui de Ginette KOLINKA ne fait pas exception. Ici ce qui m'a frappé c'est le côté « madame tout le monde » de Ginette KOLINKA. Ce n'était pas une résistante, pas une fervente pratiquante, elle ne faisait pas de politique, c'était une jeune fille dans laquelle beaucoup pourraient se reconnaître. Elle dit d'elle même qu'à l'époque, elle n'était pas particulièrement rusée ou débrouillarde. Contrairement à la plupart de ceux qui sont revenus elle n'est ni rebelle ni effrontée mais plutôt de nature à respecter les règles pour éviter les ennuis. Pas de prise de risque, pas de désobéissance, dans le camps c'est quasiment une condamnation à mort. Pourtant elle va survivre, parce qu'elle est jeune et en bonne santé, parce qu'elle aura un peu de chance et aussi grâce à des gestes d'humanité de la part des autres.

Sa personnalité fait que son regard sur ce qu'elle a vécu est atypique. La naïveté et l'incrédulité face à l'enfer et la cruauté. Il y a d'abord cette nudité qu'on lui impose brusquement et qui la choque , abasourdie, anesthésiée, cela la marquera définitivement. le déni de tout dignité la dépasse complètement, elle y est confrontée sans y croire. Comment ça peut être vrai ! Ensuite et surtout il y a la faim. Indescriptible, inimaginable, omniprésente qui lui laissera des stigmates même après. Et par dessus tout il y a son impuissance à expliquer, à comprendre parce que c'est au-delà de ce que quelqu'un sain d'esprit peu intégrer. C'est inimaginable si on ne l'a pas vécu parce que c'est inhumain.

Et puis il y a son impuissance face à la réalité d'aujourd'hui, face à ce camps où on emmène les enfants pour qu'il sachent. Mais qu'ils sachent quoi ? Ça n'a plus rien à voir. Il manque l'horreur, les vivants qui déambulent, les morts entassés, les SS qui éructent les ordres, la fumée et son odeur qui s'infiltre partout à la fois menace et crève coeur, les gens qu'on maltraite, la boue, le froid, la désolation. La vérité. Elle a disparue. Cachée sous l'herbe qui a repoussé, dissimulée par la vie qui a repris ses droits. Et c'est un peu comme si on avait effacé les preuves. Alors Ginette raconte, inlassablement, répond aux questions, fait revivre l'enfer. Et quand demain tous ceux qui savent dans leurs os, dans leur âme, jusqu'au fond de leurs tripes, quand ces survivants, ces miraculés auront disparus que restera-t-il ? Des témoignages et des lecteurs. Alors Ginette témoigne malgré le doute qui lui tord l'estomac : au moins me croiront-ils ?
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