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Critique de Fortuna


Alors que les crises économiques se succèdent, que l'avenir est de plus en plus incertain pour beaucoup, que la précarité s'installe, que nos vies nous échappent dans un monde globalisé et gouverné par le néolibéralisme, l'illusion de la toute-puissance de l'individu ne fait que s'accroître. A travers les réseaux sociaux on s'exprime, on se montre, on se like avec le sentiment orgueilleux de participer au monde. Les paramètres de nos ordinateurs et smartphones nous font imaginer être l'objet d'une continuelle sollicitude. Chacun nourrit ses rancoeurs, se replie sur des appartenances à des minorités, se prend en selfie en toute occasion, file sur sa trottinette électrique avec la satisfaction d'être seul au monde et au mépris de tous les autres usagers de la route et des trottoirs…La notion de monde commun, de respect de l'autorité, d'obéissance aux institutions s'effondre à mesure que croissent les revendications des uns et des autres qui s'estiment lésés, incompris, oubliés, délaissés, peu considérés, stigmatisés…La violence s'affirme alors comme mode naturel de réaffirmer ses droits, d'imposer ses particularités.

Eric Sadin nous livre une brillante analyse des dérives de nos sociétés modernes ultra libérales et du danger qui les menace face à ce repli sur un individualisme tyrannique : l'impossibilité de vivre ensemble, d'imposer une loi commune, la rupture du contrat social et finalement le triomphe du plus fort et du plus revendicatif. Pour échapper à ce danger, il est urgent de prendre conscience de la manipulation qui est à l'origine de cette illusion d'autosuffisance, de cette apparente liberté de s'affirmer différent, de revendiquer l'accès à tout jusqu'à l'absurde, de se singulariser, au prix d'incivilités croissantes, de la montée d'une violence verbale comme physique qui se considère légitime alors qu'elle n'est que le signe d'une profonde régression. Et de rendre nos démocraties ingouvernables.
Mais on peut objecter que malgré tout cette parole nouvelle qui s'élève en parallèle d'un monde politique qui a perdu sa crédibilité et d'une société qui n'offre plus d'espoir peut également rassembler et dessiner les possibilités d'un monde nouveau. A la manière des gilets jaunes, mouvement de protestation spontanée né des réseaux sociaux et qui contenait à la base une volonté du peuple de reprendre son destin en main…
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