AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Fanny1980


Bertha vient de mourir et son fils, romancier, poète, essayiste, éditeur, lui rend un dernier hommage.

Bertha est amour pour ses enfants, ses amants, sa famille, sa communauté. Mère de quatre enfants de pères différents, elle s'est consacrée à chacun, a vécu ses rêves et ses déceptions, toujours dans le don de soi et en pensant au Pays Pourri, à Haïti, qu'elle soit à New York ou dans le Connecticut, où elle chutera une dernière fois dans son Eglise.

Bertha est une force de la nature, à l'écoute de ce qui l'entoure. « Je mesure à ta mort tout ce que tu m'as donné. Toi qui n'accumules rien sinon ce peu de ciel, de nuage et d'eau, je te dois cette abondance d'exister. Quand je ris c'est à toi que je pense. Ton grand rire de cascade rappelle les eaux mêlées des fleuves. Quand je crie mon bonheur, c'est ton visage collé à mon visage. Ton visage bondit de colline en colline et plonge ses racines dans les effluves des mers ».

Bertha ouvre son horizon et celui de ses enfants. « Toi qui sais combien les légitimités sont mal acquises. Toi qui refuses toute forme d'autorité et de certitude. Dans la vie. Dans la pensée. Tu as fait de moi quelqu'un qui doute. Tu dis : penser, c'est apprendre à douter ».

Mais Bertha a subi aussi les différences de classes sociales. Elle a appris à ses dépens que le fils de la patronne n'est pas destiné à la petite apprentie.

Bertha a vécu sous la dictature avec tout ce que ce pouvoir pouvait prendre et ne pas donner, dans ses ambiguïtés, avec un tonton macoute, dans le rôle du père préféré de l'auteur, puisqu'il savait également utiliser sa position pour créer les joies simples de l'enfance.

Bertha fait partie de ceux qui ont connu les souffrances de l'exil. « Partir ou mourir. Partir et mourir. N'est-ce pas le même verbe ? Partir ».

Dès le titre « Quand il fait triste Bertha chante », on comprend que le texte sera poétique, que l'auteur aime les mots et qu'il voudra retranscrire cette langue imagée, joyeuse, héritage sans doute d'un mélange de créole, français et anglais.

Bertha dit : « Il faut donner aux enfants le goût sucré de la terre, le poème infini de l'horizon et de l'amour ». C'est peut-être là tout le message de Rodney Saint Eloi, aider à transmettre ce qui est essentiel.

Un très beau texte qui rappelle que l'important n'est pas l'argent, mais le point d'ancrage pour stabiliser, la curiosité pour avancer et l'amour pour toujours se relever.
Commenter  J’apprécie          210



Ont apprécié cette critique (20)voir plus




{* *}