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Critique de colimasson


Il faut avoir des couilles pour se présenter comme l'écrivain du roman héritier de 1984. Il faut avoir des couilles, ou il faut être couillon. Ce roman aurait pu être un pastiche, s'il ne s'était pas voulu aussi sérieux.


Les contradictions et les raccourcis sont la seule matière vivante de ce livre. On aurait aimé se bourrer la gueule d'éléments plus nutritifs. Parcourons-les au gré d'un relevé de citations qui foutent la nausée.


« Il vérifia sa puissance sur ses propres compagnons : après quelques leçons, les pauvres diables qu'ils étaient, effrayés par l'idée que Dieu existait et les observait, se transformèrent en commandeurs au charisme infernal, ils jonglaient avec la rhétorique et la ruse de guerre. »


Pas une fois Sansal ne se demande pourquoi la soumission à la religion se fait de manière aussi simple. Quand j'étais à l'école, les vieux profs n'arrivaient jamais à se faire craindre, ni à se faire respecter. Pourquoi ça marche avec la religion ? Pourquoi l'idée de Dieu marche si bien pour engoncer les mecs dans la terreur ? Et puis aussi, pourquoi certains hommes arrivent-ils à en imposer autant à d'autres ? Pourquoi la soumission survient plus facilement que la révolte, alors qu'on présente l'homme comme animé par des idéaux d'amitié, de justice et de vérité ? Voilà les questions vraiment intéressantes, et pas ces querelles de comptoir.


« Les peuples […] sont d'une extrême sensibilité, la moindre petite rumeur les bouleverse. »


Une piste intéressante est lancée, mais abandonnée aussitôt par Sansal. Pourtant, un peu de bon sens n'aurait pas fait de mal. Pourquoi les peuples sont-ils si facilement bouleversés par la moindre coquille ? Sansal montre une attitude ambivalente envers l'humanité : tantôt pleurnichée comme un bon petit enfant à qui on fait des crasses injustes, et tantôt désigné comme une poule sans tête qui, dans le fond, mérite bien ce qui lui arrive. Un genre de jugement de Dieu terrestre.


« Mais un jour plus miraculeux qu'un autre il advint qu'il ouvrît les yeux et vît ces pauvres gens se tortiller de douleur sous ses pieds. Depuis, la fièvre de la révolte ne l'avait plus quitté. »


Dans 1984, on expliquait. Ici, on se contente de décrire, ce qui est un moyen arbitraire pour imposer des idées subjectives. La révolte et la liberté, présentées comme remèdes pour lutter contre la soumission, sont décrites en opposition radicale mais participent du même type d'attitude qui se rattache à la fascination.


Sansal s'en tient à la façade et ses questions manquent toujours leur but. La critique en reste toujours à la dénonciation de Dieu au stade épistémique pré-nietzschéen. C'est un de ses potes, Rachid Mimouni, qui l'a encouragé à écrire voilà quelques années alors qu'il ne se destinait pas à cette activité –il était plutôt du genre militant politique. Un roman publié, un deuxième, un troisième… le succès était au rendez-vous, couronné par les prix littéraires décernés par des gens qui ne lisent pas souvent, semble-t-il. Voilà comment on finit par croire qu'on peut prendre la relève d'Orwell.
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