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Critique de Aquilon62


A l'occasion de la sortie du troisième tome en Italie, et au regard de l'actualité transalpine récente, j'ai voulu le relire mais cette fois dans la langue de Dante.
ce qui modifie quelque peu la critique

Roman historique ou L Histoire en roman.

Difficile de trancher. L'auteur nous prévient dès le préambule : "Les événements et les personnages de ce roman documentaire ne sont pas le fruit de l'imagination de l'auteur. Au contraire, les faits, les personnages, les dialogues et les discours relatés ici sont tous historiquement documentés et/ou rapportés par plusieurs sources dignes de foi. Reste cependant que l'Histoire est une invention à laquelle la réalité apporte ses propres matériaux. Mais sans arbitraire."

Reste que le parti pris utilisant la technique de la multiplicité des points de vue est diablement efficace. 

Ce livre va de la fondation des faisceaux de combat de 1919 à l'assassinat de Matteotti (1924) en passant par des épisodes d'importance primordiale ou secondaire sur le plan historique, tous visaient cependant à démontrer la capacité du "fils du siècle" à tirer parti des difficultés de ses adversaires à prendre des décisions, et de son extrême adaptabilité et ténacité à poursuivre un objectif.

Explication du titre :
"Le 30 octobre 1922, à 11 h 05, alors qu'il montait l'escalier du Quirinal afin que le roi lui confie la tâche de gouverner l'Italie, Benito Mussolini, d'origine plébéienne, bohémien de la politique, autodidacte du pouvoir, dépourvu de toute expérience du gouvernement ou de l'administration publique, et député depuis seulement seize mois, était à trente-neuf ans le plus jeune Premier ministre de son pays, le plus jeune des chefs de gouvernement du monde entier, et il portait la chemise noire, l'uniforme d'un parti armé sans précédent dans l'Histoire. Malgré tout, ce fils de forgeron – l'enfant du siècle – avait gravi les échelons du pouvoir. Soudain, le nouveau siècle s'est ouvert et refermé sur ses pas."

Cette oeuvre extraordinaire de Scurati, est à ne pas manquer et pour au moins deux raisons.
D'une part en raison de la nouveauté de la structure : il est difficile de le définir comme un roman historique, bien qu'il se réfère certainement à ce genre, car il n'a pas les caractéristiques littéraires, étant la narration centrée sur une séquence de scènes uniques dans laquelle les personnages ou les événements choisis de temps en temps occupent la narration avec une technique presque théâtrale, dans laquelle les acteurs tiennent la scène quelques instants avec une puissance expressive et une tension psychologique. L'effet est extraordinaire : une véritable explosion, qui donne un caractère toujours plus vigoureux à l'histoire et confère à l'ensemble une puissance expressive unique.
Ensuite, le choix du personnage Mussolini, mis en scène sans compromis et sans jugements moraux, comme il paraît : histrionique, violent, très rapide à saisir les opportunités, toujours sans scrupules, habile rhéteur, sachant saisir les forces inhérentes aux oubliés des tranchées qui forment le noyau dur de son parti et le lectorat de son journal. Tous ses adeptes les plus ardents sont des vétérans de la guerre, plus ou moins incapables de se réadapter et enclins à la violence, violence qui, entre 1921et 1922, prend de plus en plus une connotation antisocialiste, dépassant même ses intentions d'ancien socialiste.
Parmi les nombreux personnages qui sont évoqués, deux disputent la scène au principal protagoniste pour leurs charmes et leurs forces :
D'annunzio, le poète et héros de la grande guerre, celui qui inocule le germe de la subversion avec l'expérience de Fiume (ou Rijeka de nos jours) et
Matteotti, le socialiste réformiste très lucide qui dénonce sans hésiter la violence et la corruption du fascisme naissant, payant son courage de sa vie.

En tout cas on pourra saluer à l'auteur d'avoir retranscrit à merveille l'atmosphère de ces années par la myriade de faits et d'épisodes criminels qui ont marqué la montée du fascisme. Ce récit est le livre de la décomposition d'un monde, qui donne naissance à un monstre. Et ça n'en est que plus vertigineux. L'auteur nous explique dans le détail les mécanismes de cette prise du pouvoir : les acteurs, dépassés, incapables de comprendre ce qui se passe devant leurs yeux, les chefs locaux indisciplinés, qui eux voient que Mussolini n'est pas réellement des leurs, et qui en viennent à hésiter, un roi qui n'a pa su signer un décret au bon moment.
C'est l'Histoire qui s'écrit sous nos yeux.
Cette histoire est profondément actuelle, elle est par certains côtés, une leçon pour que  l'Histoire ne se reproduise pas...

si seulement c'était vrai....
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